Aedes albopictus. Vous ne savez peut-être pas ce que c’est, mais il vous a peut-être déjà piqué. Il s’agit du moustique tigre, implanté désormais dans 42 départements français. Possible vecteur de maladies comme la dengue, le virus Zika ou le chikungunya, ce petit insecte est surveillé de très près par les autorités sanitaires. "Il est arrivé d'Asie en Italie par le commerce de pneus. Et il n'y a aucun pays qui a réussi à arrêter la progression géographique de l'espèce", regrette Charles Jeannin. Entomologiste à l’Entente interdépartementale de démoustication (EID) Méditerranée, il est avec ses collègues, en première ligne pour la lutte contre le moustique tigre.
Avec l'activation ce 1er mai du plan anti-dissémination de la dengue, de zika et du chikungunya, les EID vont reprendre leurs interventions d’urgence.
"Lorsqu'un voyageur de retour d'une zone tropicale passe chez son médecin, celui-ci prévient l'ARS. Si elle estime que les moustiques de chez nous peuvent récupérer le virus, avant même une confirmation biologique, ils nous préviennent. Et on fait une opération de démoustication ciblée autour de chez le patient pour éviter un début d’épidémie. C’est extrêmement préventif: ça arrive qu’on fasse ce genre de traitement chez des gens qui n’ont pas la maladie", raconte Charles Jeannin.
En 2017, la DGS a comptabilisé 17 cas autochtones de chikungunya.
"On peut réduire ses nuisances, mais jamais l’éliminer complètement"
Mais le combat contre le moustique tigre, c’est avant tout de la prévention. "Le terme éradication ne convient pas", prévient Gilles Besnard, entomologiste à l’EID de Rhône-Alpes. "On peut réduire ses nuisances, mais jamais l’éliminer complètement." Alors que les premiers moustiques tigres sortent de l'état larvaire, il a repris son bâton de pèlerin. De porte en porte, il explique aux gens que ce moustique totalement urbain ne peut être combattu qu’on limitant les points d’eau: un seau, une brouette qui traîne ou du mobilier de jardin, tout est bon pour le moustique tigre au moment de venir pondre ses œufs.
"Notre tâche première c’est l’information. Mais il y a toujours des gens absents, qui n’ont pas bien ni compris le message, ou qui n’y voient pas d’intérêt. Mais il suffit de laisser quelques maisons dans un quartier avec de nombreux bidons ou seaux avec de l’eau pour infester tout le quartier", prévient Gilles Besnard.
"Ça demande beaucoup de pédagogie", confirme Charles Jeannin. "Les gens vont reporter la faute sur un cours d’eau qui ne serait pas très bien entretenu par la commune par exemple. Mais quand on leur montre les larves, ils sont assez surpris de voir que le moustique est né dans leur jardin." L’EID Méditerranée, qui lutte également contre les moustiques des marais, emploie même désormais des personnes en service civique pour "évangéliser" les habitants. "Mais c’est beaucoup de temps passé quartier par quartier pour convaincre les gens, on est d’accord", assure Gilles Besnard.
"L’idée qu’un traitement insecticide permettra de régler le problème, c’est une fausse solution"
L’approche relève du travail de fourmi, mais elle reste la plus efficace et la plus pérenne. "L’idée de la majorité des gens est qu’un traitement insecticide permettra de régler le problème, c’est une fausse solution: cela n’agit que très temporairement et sur une toute petite partie des endroits où se développent les larves. Et surtout, avec des traitements, les gens arrêtent de faire des efforts pour limiter les points d’eau. Donc on va augmenter le nombre d’endroits où se développent les moustiques. On en aura encore plus que si on ne fait pas de traitement", prévient Gilles Besnard.
D’autant que le produit utilisé pour lutter contre les moustiques tigres adultes est un insecticide classique utilisé dans le monde agricole qui n’est pas sélectif et détruira tous les insectes exposés, sans exception. Ce n’est pas le cas de celui utilisé pour les larves, mais son utilisation préventive est impossible vu le nombre de cibles potentielles à traiter.
"Utiliser au minimum les produits contre cette espèce pour qu’il n’y ait jamais de résistance"
Enfin, si les doses de produit requises aujourd’hui pour l’élimination du moustique tigre sont encore très faibles, la statistique ne sera pas éternelle.
"Le moustique tigre est 10 fois plus sensible que les insectes en milieu agricole", reprend Gilles Besnard. "Mais il faut les utiliser au minimum contre cette espèce pour qu’il n’y ait jamais de résistance. C’est un phénomène qui apparaît chez tous les insectes après des traitements répétés trop souvent."
Mais les EID ne sont pas les seuls à pouvoir utiliser ces biocides: la plupart sont disponibles en supermarché. Charge à chaque riverain d’y avoir recours raisonnablement.
La guérilla contre le moustique tigre "n’est pas perdue d’avance", assure Gilles Besnard. Mais l’espèce continue inexorablement d’avancer. "Il colonise en tâche d’huile. Il n’est pas fait pour se déplacer sur de grandes distances, mais il monte dans les moyens de locomotion dans lesquels l’homme le déplace. Il est en train de coloniser tout le Sud-Ouest de la France. Et c’est comme ça qu’il est arrivé en Vendée, dans le Bas-Rhin, dans le Val de Marne…", énumère Charles Jeannin. Et pour tous les autres, un portail en ligne permet désormais de signaler la présence du moustique tigre.
http://www.bfmtv.com/societe/la-lutte-contre-le-moustique-tigre-n-est-pas-une-guerre-totale-c-est-une-guerilla-urbaine-1433470.htmlBagikan Berita Ini
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