Jusqu’au 4 juin, plusieurs dizaines de milliers de professionnels vont dresser l’état de l’art sur la recherche en cancérologie lors du congrès de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO). Pour s’y retrouver dans la pléthore de présentations, deux experts mobilisés par Unicancer, Pierre Fumoleau, directeur général de l’Institut Curie, à Paris, et François Ghinringhelli, du Centre de lutte contre le cancer Georges-François Leclerc, à Dijon, ont accepté de jouer le rôle de guide.
Les points forts du vendredi 31 mai 2019 : coup de projecteur sur les cancers de la sphère ORL et ceux de la prostate.
Les cancers des voies aérodigestives supérieures, qui représentent chaque année environ 650 000 nouveaux cas dans le monde dont 16 000 en France, ont souvent comme origine la consommation d’alcool et de tabac. Cependant, on découvre depuis peu l’implication du virus du papillome humain (HPV), déjà connu pour son rôle dans le cancer de l’utérus. Ainsi, en Australie, on vaccine désormais aussi bien les hommes que les femmes pour éviter les complications cancéreuses de l’infection.
Un essai clinique de phase II mené par Douglas Adkins, de l’université Washington, à Saint-Louis, dans le Missouri, montre le bénéfice d’une association de deux traitements sur la survie des patients atteint d’un cancer des voies aérodigestives supérieures non liées à HPV. Le premier est une immunothérapie base de cetuximab (un anticorps monoclonal murin humanisé). Le second est une chimiothérapie récente qui exploite l’effet inhibiteur sur le cycle cellulaire du Palbociclib. La combinaison des deux molécules augmente de 50 % l’espérance de vie.
Joel Guigay et ses collègues du centre de cancérologie Antoine Lacassagne, à Nice, présentent quant à eux une étude de phase III. Elle montre l’intérêt qu’il y a, pour des patients atteints eux aussi d’un cancer des voies aérodigestives supérieures, à remplacer le traitement classique (Le fluoro-uracile, ou 5-FU), par des taxanes, la classe de molécules du paclitaxel (le Taxol) et du docétaxel (le Taxotère), le premier ayant été isolé de l'if Taxus brevifolia. Pour une efficacité supérieure, les taxanes sont en outre administrés moins longtemps et ont moins d’effets secondaires.
Une autre étude importante porte sur le cancer des glandes salivaires, une maladie orpheline sans réel traitement. Bob Li, du Memorial Sloan Kettering Cancer Center, à New York, et ses collègues ont mis en évidence l’efficacité du Trastuzumab emtansine (Kadcyla), une molécule chimère qui allie un anticorps, le Trastuzumab (connu sous le nom d’Herceptine et prescrit dans certaines formes de cancer du sein) à un agent cytotoxique nommé DM1 (un perturbateur du cytosquelette). Ces résultats positifs posent le problème de l’Autorisation de mise sur le marché, et donc du remboursement, avec si peu de patients, les études complètes requises étant impossibles.
Le cancer de la prostate est le plus représenté chez l’homme, avec plus de 50 000 cas déclarés en 2018 (contre 31 000 pour le poumon et 23 000 pour le cancer colorectal). Avec plus de 8 100 décès en 2018, il est la troisième cause de mortalité chez l’homme, ce taux reculant de 2,8 % par an en moyenne depuis 1990 grâce notamment au dépistage de l’antigène PSA. Pris tôt, le cancer est assez bien soigné, mais il peut déclencher le développement de métastases essentiellement osseuses qui entravent la production de cellules sanguines et peuvent, à terme, entraîner la mort. Les traitements classiques sont des hormonothérapies qui font baisser le taux de testostérone dans le corps : c’est une sorte de castration chimique.
Marc Pujalte Martin, du centre de cancérologie Antoine Lacassagne, à Nice, et collègues ont comparé l’effet d’une hormothérapie à base de docetaxel (un taxane) seul ou associé à la metformine (un antidiabétique). Résultat, pas d’effet positif probant, mais c’est néanmoins une information importante à l’heure où le métabolisme est une piste importante dans le traitement du cancer. De fait, de nombreux malades testent les effets du jeûne, et il importe donc de démêler le vrai du faux. Il y a quelques années, on avait montré l’apport d’un jeûne chez des souris traitées par chimiothérapies, mais la privation était très importante : les rongeurs avaient perdu 20 % de leur masse corporelle. Les chercheurs concluent sur la nécessité d’étudier plus en détail les possibles avantages de la metformine.
Kim Chi, du centre de cancérologie BC, à Vancouver, au Canada, et ses collègues, se sont penchés sur la castration chimique hormonale lorsqu’elle est complétée par l’apalutamide, un inhibiteur des récepteurs à androgènes. L’idée est de compléter l’hormonothérapie en supprimant les effets possibles de testostérone résiduelle, par exemple celle sécrétée par les surrénales (non ciblée par l’hormonothérapie) ou par les cellules cancéreuses elles-mêmes. Les résultats sont très encourageants en termes de survie des patients. Les risques de rechute sont repoussés de deux ans, et la qualité de vie est améliorée.
Karim Fizazi, de l’Institut Gustave Roussy, à Villejuif, présentera les effets du darolutamide, un inhibiteur du récepteur des androgènes récemment développé. Avec ses collègues, il a montré que la molécule réduit les risques de douleur sans nuire à la qualité de vie des patients traités pour un cancer de la prostate non métastatique.
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