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« Les pénuries de médicaments sont un problème purement financier » - Le Monde

En dix ans, le nombre de médicaments en rupture de stock a été multiplié par plus de dix, passant de 44 en 2008 à plus de 600 en 2018. Et ce chiffre ne cesse d’augmenter. La ministre de la santé Agnès Buzyn doit présenter lundi 8 juillet un plan pour lutter contre ces pénuries. Le professeur Alain Astier, membre de l’Académie nationale de pharmacie, qui a dirigé pendant près de quarante ans le département de pharmacie du groupe hospitalier Henri-Mondor à Créteil (AP-HP), en explique les causes.

On assiste à de plus en plus de pénuries de médicaments. De quoi parle-t-on ?

Alain Astier : On peut parler de ruptures d’approvisionnement lorsqu’une pharmacie d’officine ou d’hôpital est dans l’incapacité de dispenser la molécule à un patient, dans un délai de soixante-douze heures. Ces ruptures peuvent être de courte durée, ou beaucoup plus longues, jusqu’à l’arrêt du produit. Leur gravité dépend de sa nature et de sa capacité à être remplacé par d’autres. Cela peut, par exemple, concerner l’hypertension artérielle, mais comme il existe une grande variété de médicaments alternatifs, il n’est pas trop gênant de passer d’un produit à un autre. Même s’il peut y avoir un problème de tolérance et de changement de forme du médicament qui peut influer sur l’observance, notamment pour les personnes âgées.

Mais cela concerne aussi de plus en plus les médicaments importants, dits d’intérêt thérapeutique majeur (MITM), qui ne disposent pas d’alternatives appropriées. Une interruption de traitement représente une perte de chance pour le patient et peut mettre en jeu le pronostic vital. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) ne prend souvent en compte que ces catégories. Et cela ne va faire qu’augmenter, car il n’y a malheureusement aujourd’hui aucune raison que cela s’arrête. Ce phénomène est très préoccupant. C’est un problème majeur de santé publique. L’Académie de pharmacie s’inquiète depuis longtemps de cette situation, qui ne concerne pas que la France d’ailleurs. Elle a produit un rapport sur ce sujet en juin 2018, tout comme le Sénat en octobre 2018.

Quelles classes sont les plus concernées ?

Les plus concernées sont les anticancéreux, les anti-infectieux (dont les antibiotiques et les vaccins), les produits d’anesthésie (curares, anesthésiques locaux pour la péridurale, antalgiques…) et les médicaments du système nerveux central (pour traiter notamment l’épilepsie ou la maladie de Parkinson), ou les corticoïdes, dont on a parlé récemment, qui concernent des centaines de milliers de patients. Par exemple, pour l’anesthésie et les curares, administrés annuellement à plus de 1,5 million de personnes en France, il existe de nombreuses molécules, possédant chacune des propriétés différentes. Les ruptures en curares sont malheureusement fréquentes. Lorsqu’un produit est manquant, il faut alors modifier le protocole, le risque d’erreur est plus grand, en termes de dosage, de notices écrites en langue étrangère du fait d’importations en urgence, etc.

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https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/07/07/les-penuries-de-medicaments-sont-un-probleme-purement-financier_5486513_1650684.html

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