L'Académie de médecine avait alerté il y a plusieurs mois sur les risques existant lors de la réalisation de tests nasopharyngés, même si les complications graves restent extrêmement rares.
L'exécutif s'est vanté ces derniers mois des centaines de milliers de tests de dépistage Covid-19 réalisés chaque semaine en France, face au très contagieux variant Omicron. Dans ce contexte de multiplication du nombre de tests, un communiqué de l'Académie nationale de médecine, datant d'avril 2021, est de plus en plus partagé, comme le note 20 Minutes.
Titré, "les prélèvements nasopharyngés ne sont pas sans risque", il décrit des complications possibles liées à ce type de dépistage - qui se fait avec un écouvillon dans le nez, utilisé pour les tests antigéniques et PCR - "devant la multiplication et la répétition des prélèvements, parfois effectués dans des conditions inadaptées".
"Si certaines complications peuvent être considérées comme bénignes (désagrément, douleur ou saignement), de graves complications commencent à être décrites dans la littérature médicale", est-il écrit, "notamment des brèches de l’étage antérieur de la base du crâne associées à un risque de méningite".
"C'est très rare qu'il y ait des conséquences graves"
Des complications graves ont en effet pu être observées à la suite de tests nasopharyngés, comme le soulignent quelques articles scientifiques, relatant de cas individuels. Un papier publié dans JAMA le 1er octobre 2020 décrit un cas de "fuite du liquide céphalo-rachidien après un test nasal pour Covid-19". Un autre papier publié dans la revue NCBI s'intéresse lui à une "méningite due à une fuite de liquide céphalo-rachidien après un prélèvement nasal".
"C'est un geste médical invasif, c'est très rare qu'il y ait des conséquences graves, mais comme tout acte médical, parfois il y en a", déclare à BFMTV.com Rayan Sater, biologiste, membre du Syndicat des Jeunes biologistes, qui parle d'erreurs "à la marge".
"Le risque peut être réel si on fait mal le test", explique à BFMTV.com le Dr Jean-Marc Juvanon, ORL et membre de la société française d'ORL. Ainsi, si l'écouvillon n'est pas enfoncé à l'horizontal - comme il le devrait - mais "vers le haut, si on suit ce trajet on peut atteindre au bout la lame criblée", une fine cloison osseuse située au-dessus de la cavité nasale.
Le médecin précise que cet endroit est "haut et étroit", et qu'il s'agit quand même d'un os, mais "si on pousse trop loin et trop fort on peut le percer, c'est possible en théorie". Le risque de cette action "est d'entraîner une méningite ou un abcès cérébral, c'est grave".
En pratique, si l'écouvillon est enfoncé à l'horizontal, il n'y a pas de danger de ce côté-là: il suit le plancher de la fosse nasale jusqu'au rhinopharynx, au-dessus du palais. Il faut "introduire l’écouvillon en suivant horizontalement le plancher de la cavité nasale et ne le dévier en aucun cas vers le haut, en direction de la base du crâne", écrit ainsi l'Académie nationale de médecine.
"Certains ne vont pas assez loin, d'autres trop et font mal"
Mais "dans la quasi-totalité des cas, le prélèvement nasopharyngé est bénin. En effet, bien réalisé, il ne présente aucun risque car il n'y a aucune effraction de muqueuse, car l'écouvillon reste dans le conduit nasopharyngé", déclare à BFMTV.com Arthur Clément, médecin biologiste au Laboratoire Clément.
Si conséquence grave il y a, cela peut venir, d'une part, du testeur. "Les gens qui prélèvent très mal ça existe, même parmi le personnel médical", explique ainsi Rayan Sater. "Certains ne vont pas assez loin, d'autres trop et font mal", sans toutefois provoquer les répercussions graves décrites par l'Académie nationale de médecine. "Il faut être bien formé", appuie le biologiste, qui ne connait personnellement pas d'exemple de complications graves à la suite d'un test.
De l'étudiant en biologie en passant par le pompier, de nombreux étudiants ou professionnels divers ont été habilités et formés ces derniers mois pour réaliser des tests, afin de tenir la cadence des demandes. "Je suppose qu'ils l'ont bien été", déclare Jean-Marc Juvanon qui ne note pas non plus de complications graves à la suite d'un test nasopharyngé en France.
"En plus d'être dangereux, un prélèvement mal réalisé entraîne un risque de faux négatif", note également Arthur Clément.
Concernant les autotests, qui s'effectuent donc sans supervision médicale, l'Académie nationale de médecine met en garde contre "des faux négatifs lorsque l’écouvillonnage est trop timide et superficiel, mais pouvant aussi devenir dangereux lorsque l’écouvillonnage est trop profond et dirigé dans la mauvaise direction".
Pour Jean-Marc Juvanon, dans ce cas-là, le risque vient plutôt du mauvais geste, "comme pour les gens qui se coincent des cotons tiges dans l'oreille, quand on commence à introduire quelque chose dans son corps il y a un risque".
"Il y aura toujours des cas exceptionnels"
D'autre part, il y a aussi des antécédents chez les patients qui peuvent entraîner des complications. "Il y aura toujours des cas exceptionnels, des brèches préexistantes chez un patient", explique Jean-Marc Juvanon.
Dans l'étude de JAMA, la patiente décrite avait ainsi un passé "d'hypertension intracrânienne idiopathique" (trouble neurologique) et avait eu une "ablation des polypes nasaux". Dans ses conclusions, l'étude souligne qu'il "convient d'envisager des méthodes alternatives au dépistage nasal chez les patients présentant des anomalies antérieures connues de la base du crâne, des antécédents de chirurgie des sinus ou de la base du crâne, ou des conditions prédisposant à l'érosion de la base du crâne".
En ce sens, l'Académie de médecine recommande de "s’enquérir, avant tout prélèvement, d’éventuels antécédents accidentels ou chirurgicaux de la sphère ORL pouvant modifier l’anatomie des cavités nasales et sinusales, notamment les interventions concernant la cloison, le cornet nasal inférieur et les sinus de la face".
Il est donc primordial de continuer à bien former les personnes réalisant des tests, alors que la pandémie de Covid-19 est encore loin d'être terminée, et que cette méthode de dépistage va continuer à faire partie de nos vies.
Les incidents, s'ils existent et ne doivent pas être tus, restent très marginaux. "Sur les milliards de tests réalisés en deux ans, on ne retrouve que très, très peu de cas graves", appuie ainsi Jean-Marc Juvanon, même si, "on ne peut pas dire que le risque n'existe pas".

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