Le don de cerveau est un acte rare et précieux qui permet de faire avancer la recherche médicale sur les maladies neurodégénératives, comme c’est le cas pour la maladie d’Alzheimer.
Le don de cerveau est vital à la recherche. Depuis les années 1980, les scientifiques ont fait des avancées majeures dans la description des maladies neurodégénératives, dans l’identification des molécules mises en cause ou encore dans la compréhension des mécanismes impliqués. À l’occasion de la Semaine du Cerveau, qui se tient du 13 au 19 mars et soutenue par la Fondation Vaincre Alzheimer, zoom sur l’importance de ce type de don.
Contrairement aux autres organes, comme les reins, le foie, le cœur ou les poumons, le consentement n’est pas présumé pour le cerveau. Cet organe ne peut pas être greffé pour sauver la vie d’autrui, mais est destiné à la recherche. Le consentement du donneur par écrit, ou de sa personne de confiance, est donc nécessaire pour un prélèvement après la mort.
Mieux comprendre la maladie pour trouver de nouveaux traitements
En France, c’est la Biobanque Neuro-CEB, banque tissulaire nationale déclarée au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui est chargée de collecter les dons. “Il y a des dons de cerveau par maladie (Parkinson, sclérose en plaques…), nous explique Maï Panchal, Directrice Générale et Scientifique de la Fondation Vaincre Alzheimer. Concernant la maladie d’Alzheimer, on recense une vingtaine de consentements par an et autour de 15 dons de cerveau par an. Parmi les consentements, il y a beaucoup d’enfants de personnes malades. On aurait davantage besoin que des personnes âgées non malades fassent des dons de cerveau”.
Si le don de cerveau est aussi important pour la recherche, c’est parce qu’aucun modèle de cerveau expérimental, aussi précis soit-il, n’est semblable à celui de l’Homme. Aujourd’hui encore, les mécanismes de la maladie d’Alzheimer sont mal connus. Mieux les identifier pourrait permettre de découvrir de nouvelles molécules et d’élaborer de nouveaux traitements. “Quand les chercheurs émettent une nouvelle hypothèse sur la maladie ou trouvent une molécule d'intérêt, ils doivent la vérifier sur des modèles animaux et ensuite, se confronter à la réalité humaine”, précise Maï Panchal. Grâce au don, les chercheurs peuvent ainsi comparer les cerveaux malades et non malades et valider ou non leur hypothèse sur le tissu humain post mortem.
“Un cerveau, c’est 10 ans de soutien à la recherche !”
Dans le cadre du don de cerveau, le délai entre le décès et le prélèvement ne doit pas excéder 48 heures pour éviter la dégradation des molécules. Un réseau national d'experts neuro-pathologistes de la Biobanque permet de tenir ce délai dans la France entière. “Une fois le cerveau collecté, un hémisphère est fixé dans le format aldéhyde et l’autre hémisphère va être congelé à -80°C et échantillonné. Chaque échantillon représente les différentes régions du cerveau (frontale, temporale…), détaille la Directrice Générale et Scientifique. Un cerveau, c’est à peu près 10 ans de recherche.”
En pratique, de très petits échantillons sont utilisés par les chercheurs et un seul cerveau peut être utilisé dans de nombreux projets. La Biobanque a pu ainsi soutenir plus de 200 projets de travaux de recherche depuis sa création et plus de 100 articles ont été publiés dans les revues scientifiques. “Toutes les grandes avancées comme par exemple la découverte des deux protéines toxiques qui s’accumulent dans le cerveau des malades d’Alzheimer ont été découvertes grâce au don de cerveau”, souligne la spécialiste.
La piste de la multithérapie
En 2020, la Fondation Vaincre Alzheimer a par exemple financé le projet du Dr Dhenain. Son objectif : identifier les mécanismes responsables de la propagation et de la toxicité des dépôts amyloïdes dans le cerveau. Son étude a montré que des échantillons de cerveaux, en apparence sains, peuvent transmettre une des lésions de la maladie d’Alzheimer. Dans des circonstances exceptionnelles, des dépôts amyloïdes pourraient ainsi être transmis d’un patient à l’autre après un acte médical par injections d’hormone de croissances issues de cerveaux par exemple.
S’il est possible de ralentir l’évolution de la maladie d’Alzheimer, elle ne se guérit pas. “L’immunothérapie approuvée par les autorités sanitaires américaines, et pas encore approuvée en Europe, n’est pas une solution miracle car même mise en place très tôt, le ralentissement du déclin cognitif est de l’ordre de près de 30%, souligne Maï Panchal. On se rend compte que la maladie d’Alzheimer est multifactorielle, qu’il y a plusieurs protéines en jeu et plusieurs mécanismes délétères. La solution serait donc la multithérapie.” Une hypothèse qui pourra être vérifiée grâce au don de cerveau.
VIDÉO - Dr Christian Recchia : "Pour éviter la maladie d’Alzheimer, il y a un certain nombre de choses que l’on maîtrise, que l’on peut faire"
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