Alcoolisme féminin : les indices qui doivent alerter

Sur 7.000 personnes qui ont joué à "Le secret de Laurence", seules 3 ont réussi à identifier le problème de Laurence juste en fouillant son appartement : elle est alcoolique. Car l'alcoolisme des femmes, qui concerne au moins 500.000 d'entre elles en France, peut longtemps passer inaperçu. Gratuit, ce jeu a été lancé par le Fonds Actions Addictions et réalisé sur le modèle des jeux d'évasion ("Escape game") grâce au mécénat de l'agence publicitaire BETC. Ce site, qui centralise tous les moyens de s'informer et de se faire aider en matière d'addictions (alcool, tabac, jeux, héroïne...), dévoile lundi 12 février 218 la solution à l'énigme dans le cadre d'une opération de sensibilisation et d'information relayée sur les réseaux sociaux.

TIRE D'UNE HISTOIRE VRAIE. Laurence Cottet, ancien cadre d'un grand groupe du BTP, qui a perdu son mari à 35 ans, est réelle. "J'ai basculé entre 36 et 48 ans" dit-elle en évoquant les nombreux pots au travail. Un jour, en 2009, elle s'effondre ivre à une réception de 650 personnes dans son entreprise. L'incident l'a sauvée : "je n'avais plus à me cacher". "48 heures après" elle se faisait prendre en charge et ne boit plus "depuis 9 ans". Pendant plus d'une dizaine d'années, son entourage professionnel, amical et familial n'a pas su, puis n'a rien fait : ce qui se passe dans la majorité des cas, souligne le Pr Reynaud. "Donc il faut agir au plus tôt". En 2016, la plateforme addictaide avait lancée dans le même esprit l'opération "Louise Delage : like my addiction", personnage photogénique, cette fois fictif, qui postait sur Instagram des photos de ses excès alcooliques sans que ceux qui appréciaient ces images ne voient son problème.

Les signes physiques de l'alcoolisme que les femmes cachent par des artifices

Dans les cas d'alcoolisme chronique, le corps est mis à rude épreuve, notamment chez les femmes qui sont plus fragiles physiologiquement que les hommes. Les malades apprennent à dissimuler leurs séquelles physiques pour rester présentables et ne pas éveiller les soupçons de leur proche. "Vous buvez tous les jours, votre visage vous trahira", témoigne Laurence Cottet. Physiquement, les signes peuvent notamment être une couperose (couleur rouge sur le visage), un corps bouffi, des cheveux ternes, des dents qui saignent, une mauvaise haleine… Des symptômes que les femmes peuvent arriver à dissimuler par le maquillage ou autres artifices, d'après le Pr Amine Benyamina, psychiatre addictologue, interviewé dans plusieurs vidéos disponibles sur le site. En France sur 5 millions de personnes ayant des problèmes avec l'alcool, 1,5 million sont des femmes. Parmi ces dernières, entre 500.000 et 800.000 souffrent d'une dépendance à l'alcool, relève le Pr Michel Reynaud, président du Fonds Actions Addictions, initiateur du.

Un jeu pédagogique qui montre les signes devant alerter

"Le secret de Laurence est un jeu pédagogique qui démontre qu'il est facile de passer à côté de l'addiction d'un proche", explique à l'AFP le Pr Reynaud. Dans l'appartement reconstitué que Laurence Cottet habitait, se trouvaient divers indices : laisser-aller général avec meubles cassés non remplacés, tapis taché de rouge (vin), miroirs brisés, frigo avec de la nourriture périmée et jus d'orange dissimulant de la vodka ainsi, entre autres, que des factures impayées, des post-it et de l'argent liquide. "Je prenais beaucoup d'argent liquide (2 à 3.000 euros) pour pouvoir acheter de l'alcool quand j'oubliais mon code de carte bleue", raconte Laurence. L'internaute peut ainsi circuler dans l'appartement et zoomer sur certains indices. Des vidéos interviewant Laurence et des médecins spécialistes complètent la visite.

EN SAVOIR PLUS. Le portail Addict Aide propose une autoévaluation pour la personne touchée et fournit aux proches (section "la maison des familles") des informations sur les stratégies à adopter, un annuaire des professionnels de santé et des numéros des aides téléphoniques. "La sensibilisation et l'information sont d'autant plus importantes que l'on peut, hélas, prédire une épidémie d'alcoolisme dans les dix ans qui viennent avec la banalisation des ivresses et des alcoolisations massives chez les jeunes femmes", assure le Pr Reynaud.

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