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TÉMOIGNAGE. « Louise n'est pas trisomique, elle a la trisomie 21 »

Mère d’une petite Louise née avec un chromosome en plus, Caroline Boudet se bat pour contrer les clichés entourant la Trisomie 21, dont c’est aujourd’hui la Journée mondiale. « C’est un handicap visible et tout le monde est persuadé ce que sont les trisomiques. C’est faux », martèle-t-elle. Avec son époux, la journaliste a lancé une campagne sur les réseaux sociaux pour démonter les clichés.

Réduire les trisomiques à leur handicap est une erreur. Auteure du livre « La vie est pleine de surprises » (Fayard, 2016) qui racontait comment elle a vécu la naissance et les premiers mois de sa fille, Caroline Boudet, journaliste de formation, fait bon usage des réseaux sociaux pour contrer les préjugés.

Vous avez publié une campagne démontant 21 clichés concernant les personnes portant la trisomie 21, à travers 21 portraits de personnes trisomiques.

On aurait pu continuer à décliner. Moi-même, avant, j’avais des certitudes : « Ils se ressemblent tous » ou « lls sont toujours joyeux ». Il y a plein de choses fausses qui leur collent à la peau. On s’est efforcé de trouver des contre-exemples médiatisés, grâce aux réseaux sociaux. L’un des plus communs est « ils sont très heureux et c’est bien, ils ne se rendent pas compte de leur condition. » C’est totalement faux. Ils s’en rendent compte, ils peuvent en être tristes, être dépressifs. Ils ne s’expriment pas forcément tous très bien. Mais beaucoup comprennent quand on parle d’eux, beaucoup ressentent bien les réactions de rejet. La société a beaucoup d’efforts à faire.

Les acteurs trisomiques de la série américaine Born This Way illustrent le 17e cliché. | DR

Certaines personnalités que vous mettez en valeur, comme Madeline la mannequin australienne sont exceptionnels. Ne le sont-ils pas trop pour être significatifs ?

Certains peuvent sembler exceptionnels, mais ce n’est pas le cas de tous. L’idée générale est que la trisomie est une particularité qu’on a mais qui ne doit pas être la première. L’important est de ne pas réduire la personne à ce handicap. Et surtout affirmer qu’il ne définit pas à l’avance le destin de la personne. Ni son caractère, ni son destin, ni ce qu’elle veut être. J’aimerais qu’à l’avenir, on voit Louise comme telle et pas d’abord la petite trisomique. Elle l’est, on n’est pas dans le déni, elle gardera son chromosome 21 en plus mais elle n’est pas que ça. On le voit au quotidien, mais il faut que les gens le sachent.

Votre petite fille Louise a trois ans. Rapidement, vous avez utilisé les réseaux sociaux pour parler d’elle.

J’ai appris la trisomie de Louise à sa naissance, comme cela arrive encore à beaucoup de personnes. Ce qui est terrible, c’est une seconde avant vous avez un bébé. Et la seconde d’après vous avez un bébé trisomique. Cela peut mettre d’emblée une distance entre vous et votre bébé. Quand elle a eu quatre mois, j’ai eu une journée plus difficile que les autres, et j’ai publié une sorte de coup de gueule. J’ai posté une photo de ma fille et mentionné les questions que j’en avais marre d’entendre, plus ou moins maladroites, pas forcément malveillantes. Le post a créé un engouement inattendu. Il a été traduit, a fait le tour du monde. J’ai d’abord créé une page Facebook pour recevoir les messages des gens, en handicap, proches, ou simplement touchés. Puis, j’ai écrit le livre et, avec mon mari, nous avons créé une association (Extralouise). Notre but est de changer le regard avec la trisomie 21.

Louise et sa mère Caroline. | DR

C’est un handicap à part ?

Certains handicaps souffrent d’être invisibles, la trisomie 21 fait partie des handicaps très visibles. Il y a des traits physiques particuliers, reconnaissables, ce qui fait qu’on pense tous savoir comment sont les trisomiques. Le message qu’on veut faire passer, avec d’autres, est que ce sont des personnes qu’il ne faut pas ranger dans des cases, qu'ils sont tous différents, qu'ils ont des possibilités, et qu'ils peuvent prendre leur place dans la société pour peu qu’on leur en laisse le temps, l’espace et la liberté.

L’autre volet de votre combat, c’est l’inclusion des trisomiques dans la société ?

Pas l’inclusion à tout prix, mais le droit de choisir pour la personne handicapée. Qu’elle soit considérée comme une personne à part entière, qui participe vraiment à ses choix. Pour l’instant, on est dans une société qui décide beaucoup à la place des personnes handicapées. Les décisions sont prises à un niveau administratif, c’est lourd à porter. Si on le demande à la plupart des familles d’enfants trisomiques, les choses les plus lourdes à porter au quotidien sont les démarches administratives. Ce n’est pas un handicap lourd à porter au quotidien. Il ne demande pas des soins démentiels. Par contre, le système met dans des cases. Quand vous êtes dans la case trisomique, très rapidement on va vous dire, vous n’allez pas rester avec les autres et aller dans votre petite case. Et ce n’est pas forcément le mieux pour tout le monde.

On devient forcément militant quand on est parent d’enfant handicapé ?

Pour moi, il y a eu cette histoire de buzz, et on devient un peu porte-parole, ce dont je n’avais pas forcément envie, Mais c’est votre enfant, comme tout parent, vous voulez vous battre pour lui. Et quand on est parent d’un enfant handicapé, on a des choses en face de nous qui sont très lourdes, qui incitent à devenir militant. On le fait beaucoup pour son enfant, lui assurer le meilleur avenir possible, comme pour nos enfants qui ne sont pas handicapés (Louise a un grand frère de 7 ans). Mais c’est trois fois plus difficile.

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