Certaines populations plus à risques doivent éviter la consommation de compléments alimentaires contenant de la mélatonine, d'après l'Agence de sécurité sanitaire (Anses). Cette dernière a en effet reçu 90 signalements d'effets indésirables de 2009 à mai 2017 suite à la prise de ce type de produits, et dont 19 étaient suffisamment documentées pour en conclure une imputabilité du produit. C'est sur la base de cette analyse que l'Anses a produit des recommandations pour l'usage de ces compléments alimentaires dont le dosage en mélatonine peut être équivalent à celui de certains médicaments, en l'absence de données jugées suffisantes sur l'innocuité d'une telle dose prise quotidiennement.
Des effets indésirables généraux, neurologiques et gastroentérologiques
La mélatonine est une hormone produite pendant la nuit qui module l'humeur, le système immunitaire, la température corporelle, la motricité intestinale et l'horloge biologique. Ainsi, la prise de mélatonine favorise l'endormissement et elle est principalement commercialisée pour "atténuer l'effet du décalage horaire" ou "réduire le temps d'endormissement". Une étude citée par le rapport de l'Anses établit en effet que "lorsque la mélatonine est administrée l'après-midi ou dans la soirée, (...) le pic de sécrétion de mélatonine survient plus tôt, avec un effet sédatif provoquant une augmentation de la sensation de fatigue, un allongement du temps de réaction et une diminution de la latence d'endormissement". La mélatonine "possède également une action vasodilatatrice, vasoconstrictrice et pro-inflammatoire", avertit l'Anses, des effets physiologiques qui peuvent, "dans certaines conditions, ou lors d'interaction avec d'autres substances, conduire à l'apparition d'effets indésirables". Ces derniers peuvent être variés, puisque l'Anses rapporte avoir reçu des signalements pour "symptômes généraux (céphalées, vertiges, somnolence, cauchemars, irritabilité), troubles neurologiques (tremblements, migraines) et gastroentérologiques (nausées, vomissements, douleurs abdominales)" suite à la consommation de compléments alimentaires contenant de la mélatonine. Les usagers avaient consommé les suppléments Somniphyt 30 du laboratoire Santé verte, Mélatonyl (Arkopharma), Novanuit (Sanofi), Mélatonine (Solgar), Valdispert Mélatonine (Vemedia pharma), Govital Mélasommeil (Urgo), Granions Somdor+Mélatonine et Mélatonine Valériane Sommeil (Vitarmonyl). A la suite d'une analyse approfondie de chaque cas et de la littérature scientifique, l'Anses a émis des recommandations sur la consommation de ces produits et les risques associés.
Des populations à risque face aux compléments alimentaires contenant de la mélatonine
NE PAS CONSOMMER. L'Anses recommande de ne pas consommer de mélatonine sous forme de compléments alimentaires "aux personnes souffrant de maladies inflammatoires ou auto-immunes, aux femmes enceintes et allaitantes, aux enfants, aux adolescents et aux personnes devant réaliser une activité nécessitant une vigilance soutenue et pouvant poser un problème de sécurité en cas de somnolence".
AVIS MEDICAL RECOMMANDE. L'Agence déconseille la consommation de compléments alimentaires contenant de la mélatonine sans avis médical "pour les personnes épileptiques, asthmatiques, souffrant de troubles de l’humeur, du comportement ou de la personnalité ou suivant un traitement médicamenteux".
Avec près d'1,4 millions de boîtes vendues chaque année en France, la mélatonine connaît une popularité croissante depuis sa première autorisation de mise sur le marché en 2007 sous forme de médicament. Des compléments alimentaires contenant jusqu'à 2 mg de mélatonine, des doses comparables à celles du médicament soumis à ordonnance, sont aujourd'hui en vente libre. En l’absence de données suffisantes sur l’innocuité de la consommation quotidienne d'une telle dose, l'Anses s'interroge "sur la place de la mélatonine sur le marché sous forme de complément alimentaire à des doses comparables à celles du médicament". L'Agence estime ainsi nécessaire "qu’un cadre réglementaire harmonisé soit défini au niveau européen sur la base d’études de sécurité conduites pour des doses inférieures à 2 mg". Elle précise en effet que la dose autorisée dans les compléments alimentaires est très variable d'un pays à un autre : 2mg également en Lettonie, 1mg à Chypre, en Croatie, Espagne, Grèce, Italie et Pologne, 0,28mg en Allemagne, et carrément interdite hors médicaments au Danemark, en République Tchèque, au Royaume Uni, en Slovénie et en Suisse.
Les compléments alimentaires en général sont des produits à consommer avec précautions
De manière générale, l'Anses rappelle que les compléments alimentaires ne sont pas des produits anodins, et qu'il convient de signaler leur prise et les éventuels effets indésirables liés à son médecin. "Il n'y a aucune base scientifique à tout ce que prétendent prévenir ou guérir ces produits", estimait le pharmacologue Jean-Paul Giroud, de l'Académie de médecine, alors qu'une étude du Syndicat national des compléments alimentaires (Synadiet) du 28 mars 2018 révélait que deux tiers des Français étaient convaincus des bénéfices sanitaires des compléments alimentaires… Soit la même proportion que ceux qui avouaient n'être pas très renseignés sur le sujet. "Les déficits et, a fortiori, les carences en nutriments sont très rares en population générale", confirme l'Anses sur son site internet, pointant des exceptions telles que la vitamine D et "des groupes particuliers de la population (femmes enceintes, personnes âgées en institution, populations en situation de grande précarité, par exemple)". Mais "pour une grande majorité de la population, une alimentation équilibrée permet d’apporter l’essentiel des nutriments nécessaires pour couvrir les besoins", écrit l'Anses. Ainsi, l'Agence recommande "de limiter la prise de ces compléments alimentaires à un usage ponctuel". D'après l'Agence, il est important lorsqu'on consomme des compléments alimentaires :
- de privilégier les formulations simples et d’éviter la prise concomitante de plusieurs compléments alimentaires, afin de limiter les risques d’interactions,
- d’éviter des prises prolongées, répétées ou multiples au cours de l’année de compléments alimentaires sans s’entourer des conseils d’un professionnel de santé,
- de respecter scrupuleusement les conditions d‘emploi fixées par le fabricant, responsable de la sécurité des produits qu’il commercialise,
- de signaler à un professionnel de santé tout effet indésirable survenant suite à la consommation d’un complément alimentaire.
Avec Reuters
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