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Des patients reçoivent une trachée artificielle, une première mondiale française

Une première étude française menée sur une dizaine de patients en France suggère qu'il est possible d'utiliser des greffes aortiques humaines conservées par congélation pour reconstruire des trachées et des voies aériennes enlevées par chirurgie à cause d'une grave maladie pulmonaire. Certains patients, pour lesquels aucun traitement n’existait, sont considérés aujourd’hui comme étant guéris.

Des patients reçoivent une trachée artificielle, une première mondiale française © iStock

C'est une greffe d'un nouveau genre dont ont bénéficié une dizaine de personnes à l'hôpital Avicennes (Bobigny). Il s'agit même d'une première mondiale : des greffes d'organes respiratoires artificiels. A l'instar de la trachée, le conduit respiratoire qui fait communiquer le larynx avec les bronches, et qui sert au passage de l'air pendant la respiration. Le Pr Emmanuel Martinod, chef du service de chirurgie thoracique et vasculaire de cet hôpital et son équipe ont implanté avec succès un organe respiratoire artificiel (voies aériennes, trachées et bronches) en se basant sur une matrice biologique réalisée à partir de l'aorte auprès de 12 malades qui souffraient de lésions, en majorité cancéreuses.

Plus précisément, le médecin a utilisé des aortes (la plus grosse artère du corps humain) prélevées sur des personnes décédées, avant de les transformer en trachée grâce à un processus appelé « ingénierie tissulaire ». Ces futurs organes ont ensuite été greffés sur les malades dont l'organe respiratoire a été préalablement retiré, avec un "stent" (ressort) pour empêcher les voies respiratoires de s'effondrer. L'intervention s'est déroulée en deux parties : l’ablation de la lésion puis la reconstruction des voies respiratoires à partir d’une allogreffe aortique qui était cryopréservée. Le stent, sur mesure, a été inséré dans le greffon et aucune immuno-suppression n’a été utilisée chez les patients.

Pour les patients qui souffrent de lésions évoluées

« Le greffon se compose de tissu aortique prélevé dans le cadre des prélèvements multi-organes réglementés par l’Agence de la Biomédecine. », précise l'équipe médicale, qui présente cette opération comme une «  avancée majeure dans le domaine de la greffe d’organes artificiels, tous organes confondus ». Présentée au congrès international de l’American Thoracic Society à San Diego, cette chirurgie est importante car le remplacement des voies respiratoires pourrait bénéficier aux patients atteints de cancer du poumon. Elle peut également constituer une option pour les patients atteints d'une maladie trachéobronchique (cancer, maladie du tissu de la trachée...) en phase terminale.

Vingt patients (treize hommes et sept femmes) ont été inclus mais pour sept d’entre eux, il a finalement été décidé de suivre le traitement conventionnel (sans implantation de l’organe artificiel). La transplantation a eu lieu chez les 13 patients restants : cinq d'entre eux ont bénéficié d’une transplantation trachéale, un de la carène, sept des bronches souches. « L’intervention a permis d’éviter l’ablation complète du poumon pour ceux qui souffraient de lésions bronchiques évoluées. La greffe trachéo-bronchique est en effet indiquée chez des patients étant en impasse thérapeutique ou souffrant de lésions tumorales proximales broncho-pulmonaires. », ajoute l'équipe médicale.

Les patients respirent de nouveau normalement

Ces interventions ont eu lieu octobre 2009 et février 2017 et le suivi s'est déroulé au maximum jusqu'en novembre 2017. Les résultats ont montré que la mortalité à 90 jours a été de 5 % car un patient ayant subi une transplantation carinale est décédé, mais aucun décès n'a été noté durant cette période chez ceux ayant subi une reconstruction trachéale ou bronchique. 10 des 13 patients sont toujours en vie après près de quatre ans, dont huit sont désormais capables de respirer normalement grâce à des voies respiratoires nouvellement formées. Il n’y a eu aucune complication grave liée au greffon ou au stent et ce dernier a pu être enlevé chez la majorité des malades en moyenne à 18,2 mois.

Après le retrait, les médecins ont pu également constater que de nouveaux cartilages se sont formés au niveau de la trachée, ce qui permet le maintien autonome de la fonction des voies aériennes. L’organe artificiel est donc progressivement devenu, après implantation, une structure fonctionnelle proche de la trachée et des bronches, et l’épithélium (couche cellulaire superficielle) s’est complètement reconstitué à partir de la trachée adjacente. Ainsi, l'équipe médicale estime qu'avec « un suivi maximal de sept ans et un mois, la grande majorité des patients respire aujourd’hui à l’aide du greffon qui s’est transformé. Les résultats sont donc encourageants pour la majorité d’entre eux. »

Pour les chercheurs, il est sans conteste possible que des cellules de l'aorte, mais surtout des cellules souches des patients, permettent la reconstruction d’un organe artificiel très proche de celui d’origine. Si ce procédé a été validé après sept années d’évaluation, les membres de la revue JAMA qui publie l'étude évoquent néanmoins ses limites, à savoir un nombre de patient trop limité et une étude réalisée dans un centre unique sans groupe de comparaison. Ces derniers souhaitent donc d'autres travaux pour mieux évaluer son efficacité et sa sécurité, ce que comptent faire les médecins pour aussi mieux comprendre les mécanismes impliqués et proposer ce type de traitement à de plus en plus de malades.

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