
- Si l’efficacité de la chloroquine contre le Covid-19 est toujours en cours d’évaluation scientifique, la ruée dans les pharmacies sur le Plaquenil, l’un des médicaments à base de cette molécule, a déjà commencé.
- Au point que les malades du lupus ou de polyarthrite rhumatoïde peinent parfois à se rapprovisionner en Plaquenil, médicament pourtant à la base de leur traitement.
- Le laboratoire Sanofi assure qu’il n’y a pas de pénurie à l’horizon. Par ailleurs, pour sécuriser les approvisionnements, un décret paru jeudi encadre les prescriptions de ce médicament. Mais les associations de malades restent sur leurs gardes.
C’est un coup de fil, anonyme, qui a fait déborder le vase. « Il y a un peu plus d’une semaine, une personne me contacte pour me dire qu’elle s’est procuré de nombreuses boîtes de Plaquenil et qu’elle propose de revendre aux associations de patients traités habituellement avec ce médicament », raconte Johanna Clouscard, présidente de Lupus France. Il n’a pas eu le temps de me proposer un prix, j’ai immédiatement vu rouge. »
Difficile de ne pas avoir entendu parler du Plaquenil, ces derniers jours. Ce médicament, produit par le laboratoire Sanofi-Aventis, est à base d’hydroxychloroquine, la molécule préconisée par plusieurs médecins, dont le professeur Didier Raoult, directeur de l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection, pour traiter les patients atteints du coronavirus. Son utilisation divise néanmoins le monde médical, l’efficacité de cet anti-paludique étant toujours en cours d’évaluation scientifique. C’est l’objet de l’essai clinique européen Discovery, qui teste plusieurs molécules, dont la chroloquine, pour trouver un remède thérapeutique au Covid-19.
Un traitement de base pour le lupus ou la polyarthrite rhumatoïde
Mais le Plaquenil est aussi le médicament de base pour traiter le lupus ou la polyarthrite rhumatoïde, deux maladies auto-immunes pour lesquelles le médicament à une autorisation de mise sur le marché. La première survient lorsque le système immunitaire s’attaque aux cellules de l’organisme et les détruit. « Il n’y a pas de chiffres officiels, mais la maladie touche environ 40.000 personnes en France, indique Johanna Clouscard, 36 ans, elle-même atteinte. Elle s’attaque le plus souvent à la peau, les reins et les articulations, mais les atteintes peuvent être beaucoup plus larges. Et on n’en guérit pas, le Plaquenil, avec d’autres médicaments, permet juste de stabiliser la maladie. »
La polyarthrite rhumatoïde, qui touche 300.000 personnes en France, est quant à elle, une maladie inflammatoire chronique des articulations évoluant par poussées inflammatoires, décrit Sandrine Rollot, secrétaire nationale de l’AFPric (Association française des polyarthritiques et des rhumatismes inflammatoires chroniques). En l’absence de traitement de fond, la polyarthrite rhumatoïde peut entraîner des déformations voire des destructions articulaires irréversibles. Le Plaquenil est l’un de ses traitements de fond.
Dans les deux cas donc, le Plaquenil est très souvent un traitement pris quotidiennement et sur une longue durée. Johanna Clouscard en prend ainsi depuis 17 ans, à raison de deux doses de 200 mg par jour. Et pas question d’arrêter du jour au lendemain. « Les effets se font très rapidement ressentir, reprend la présidente de France Lupus. Ce sont des douleurs articulaires, le visage qui gonfle et sur lequel apparaissent des plaques rouges. »
Une ruée dans les pharmacies depuis mi-mars ?
Or, c’est bien le scénario redouté par les malades sous chloroquine depuis que la molécule est présentée comme un possible remède miracle contre le coronavirus. Celui d’une pénurie généralisée de Plaquenil, résultat d’une ruée dans les pharmacies des Français en quête du médicament. Vendredi, dans un communiqué, les Académies nationales de médecines et de pharmacies s’inquiétaient ainsi de voir « des nombreux achats d’hydroxychloroquine par des personnes non-atteintes, à des fins souvent plus préventives que curatives ».
Comment l’expliquer alors que le Plaquenil est un médicament prescrit obligatoirement sur ordonnance depuis un arrêté par au Journal Officiel du 15 janvier? « Les pharmaciens ne le savent visiblement pas tous », glisse Johanna Clouscard. « C'est surtout que le plaquenil a beaucoup été prescrit,ces derniers jours, dans le cadre du traitement du Covid-19 », indique Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l’ordre des pharmaciens. Y compris par des médecins généralistes, à titre préventif.»
« Il y a un trafic d’ordonnances pour se procurer de la chloroquine ou des produits antipaludéens s’en approchant, on le sait », déclarait aussi Jean-Philippe Lecouffe, sous-directeur de la police judiciaire de la gendarmerie nationale, dans une interview à 20 Minutes, jeudi.
Résultat : des malades du lupus ou de polyarthite rhumathoïde ont rencontré des difficultés pour s’approvisionner en Plaquenil ces derniers jours. En témoignent les messages laissés sur les pages Facebook de Lupus France et AFPric. « Dès mi-mars », indique Sandrine Rollot. Johanna Clouscard en a fait l’expérience, cette semaine, dans le Tarn, où elle habite : « J’ai dû appeler cinq pharmacies avant d’en trouver une en capacité de me fournier une boîte de Plaquenil [qui permet de tenir quinze jours]. »
Encadrement strict des délivrances depuis jeudi
Des difficultés en passe d’être résorbées ? Dès le 22 mars, Sanofi a mis en place un système de dépannage permettant aux pharmaciens n’ayant plus de Plaquenil en stock d’être approvisionné plus rapidement. Et ce vendredi, le laboratoire annonçait avoir réapprovisionné l’ensemble des grossistes de telle sorte que toutes les pharmacies puissent leur commander de nouveaux du Plaquenil à compter de ce lundi.
En parallèle, le gouvernement a publié, jeudi, un décret encadrant la vente du Plaquenil et du Kaletra (indiqué contre le HIV et contenant également les molécules testées dans l’essai clinique européen). Le texte autorise la préscription l’hydroxychloroquine contre le Covid-19. « Mais ces préscriptions sont réservées à l’hôpital et ne pourront plus être faites par des médecins en ville», précise Carine Wolf-Thal. Une façon de réserver la molécule aux cas les plus sérieux de coronavirus. Dans tous les autres cas, seules les prescriptions pour lesquelles la Plaquenil a une autorisation de mise sur le marché (AMM) sont autorisées. C’est le cas donc pour le lupus et la polyarthrite rhumatoïde.
Des associations qui restent sur leurs gardes
De quoi stopper net la ruée dans les pharmacies en quête de chloroquine ? Johanna Clouscard reste sur ses gardes. « Samedi encore, une personne de Marseille m’a contacté pour me dire qu’elle avait beaucoup de mal à trouver du Plaquenil, illustre-t-elle. Le coup de fil anonyme d’un revendeur de médicament n’est pas non plus rassurant. Par crainte d’en manquer, des malades du lupus pourraient céder à ce type de propositions et acheter à des prix exorbitants du Plaquenil voire, même, acheter des contrefaçons. »
« La question des stocks et des délais d’approvisionnement restent une inquiétude, abonde Sandrine Rollot, pour AFPric. L’association recommande par exemple aux personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde de renouveler les ordonnances de Plaquenil quinze jours à l’avance. Elle continue aussi à tordre le cou aux rumeurs. « Quelques adhérents nous ont par exemple remonté les propos de pharmaciens leur assurant que l’hydroxychloroquine était réservée aux hôpitaux, c’est bien sûr faux », reprend Sandrine Rollot. L’association a mis en place une plate-forme en ligne, dédiée au coronavirus, où les personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde peuvent remonter les difficultés rencontrées dans leurs approvisionnements en Plaquenil. Elles sont ensuite remontées aux autorités de santé.
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