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Coronavirus : tout comprendre du débat sur la mutation du virus - LaDepeche.fr

l'essentiel Ces derniers jours tout et son contraire ont été dits concernant une éventuelle mutation du Sars-Cov-2, virus à l'origine de la maladie Covid-19, qui l'aurait rendu moins virulent. Qu'en est-il réellement ?

La cheffe du service maladies infectieuses à l'hôpital Saint-Antoine de Paris, Karine Lacombe, s'est montrée catégorique ce lundi 24 août sur France Inter. "L'histoire d'un virus qui serait éventuellement moins virulent, donc moins transmissible ou moins grave, a été complètement construite" a-t-elle fustigé, démentant ainsi un article des Echos publié le 20 août.

Ce dernier, repris par plusieurs médias et très partagé, laissait suggérer effectivement que le virus serait devenu moins virulent grâce à une mutation. Affirmation très contestable, que nous tentons d'éclaircir point par point.

  • Le virus a-t-il muté ?

La Covid-19 est une zoonose, c'est-à-dire une maladie infectieuse initialement propre aux animaux mais qui, grâce à une mutation du virus, parvient à se transmettre à l'homme. Pour rappel, une mutation est une modification du génome du virus pouvant avoir une incidence directe sur ses propriétés. Ainsi le Sars-Cov-2, à l'instar d'Ebola ou du virus de la rage, a pu passer d'un animal (une chauve-souris présumément) à l'homme après avoir muté puis le contaminer.

Mais cette mutation n'est en réalité qu'une goutte d'eau dans un océan. En effet, le Sars-Cov-2, comme tout autre virus, est sans cesse en train de muter, sauf que la quasi-totalité de ces modifications sont infimes et n'ont aucune conséquence sur la maladie. L'article des Echos rapportait un total de 7 551 mutations identifiées. Un nombre que Patrick Berche, membre de l'Académie de médecine interrogé par le journal, estime être plutôt faible par rapport à d'autres virus.

  • Une mutation d'envergure s'est-elle produite ?

Les recherches ont démontré qu'une autre mutation que celle entraînant l'adaptation du virus à l'homme a eu une répercussion directe sur la maladie. Il s'agit de la mutation dite D614G, qui agitait le monde scientifique au mois d'avril. À l’époque, des chercheurs américains du "Los Alamos National Laboratory" prépubliaient leur étude démontrant qu'une mutation s'était produite dans la région du génome qui code pour la protéine S dite "spike" ("pointe" en anglais).

C'est cette protéine qui permet au virus de se fixer sur certains récepteurs des cellules humaines. Ainsi la nouvelle version du Sars-Cov-2 issue de cette mutation, plus contagieuse, serait devenue prépondérante au cours du mois de mars, c'est-à-dire au moment où l'épidémie battait son plein en Europe.

  • Cette mutation a-t-elle vraiment rendu le virus moins virulent ?

En raison du temps de relecture que nécessite toute publication d'une étude dans une revue scientifique, celle du Los Alamos National Laboratory n'a été révélée au grand public que le 2 juillet dans la revue Cell. Soit près de trois mois après son élaboration. C'est là que l'article des Echos du 20 août est contestable : il s'appuie sur des données datant d'avril pour expliquer la situation d'août.

détail amusant : cette mutation est majoritaire depuis mars en france, en aucun cas il ne s agit d une mutation récente, elle a été identifiée fin janvier en Allemagne. (et en chine auparavant) pic.twitter.com/4FfoJLjUMC

— Le Flohic (@DrGomi) August 21, 2020

A lire aussi : Coronavirus : origine, mutation, traitement, symptômes... tout ce que l'on sait aujourd'hui sur le Covid-19

Mais cet article des Echos, paru un mois et demi après l'étude à laquelle il se réfère, pose un autre problème : il affirme que "cette mutation a pour effet d'amoindrir [la] pathogenèse [du virus], c'est-à-dire sa capacité de nuisance". Pourtant ni l'étude en question, ni aucun professionnel, n'a jusque-là tiré une telle conclusion.

  • Un virus moins dangereux, une ineptie ?

"Le virus n'a pas perdu de virulence, mais on verra peut-être dans les semaines à venir ce qu'il en est" concluait Karine Lacombe sur France Inter, contredisant l'interprétation des Echos mais n'excluant pas qu'une mutation puisse bien, à terme, rendre le virus moins dangereux. Pourtant, à en croire Stéphane Gayet, infectiologue au CHU de Strasbourg interrogé par la Dépêche, une telle éventualité est impossible.

"Les seules mutations qui ont de l’avenir sont celles qui vont vers une augmentation de la pathogénicité. Une mutation qui irait vers une diminution peut arriver, mais elle n’aurait aucun avenir" explique ce médecin. D'après lui, si une mutation induisant un affaiblissement du pouvoir pathogène se produisait, alors ce virus mutant ne pourrait pas entrer en concurrence avec une autre souche du virus plus pathogène. "Très vite, il s'éteindrait" analyse Stéphane Gayet. En clair selon lui, le plus féroce l'emportera toujours.

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