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Comment expliquer le « boom » des troubles alimentaires chez les jeunes ? - 20 Minutes

C’est un constat sans appel. « Depuis la crise sanitaire liée au coronavirus, il y a eu une augmentation de 30 % des demandes de consultation pour des troubles du comportement alimentaire (TCA) », rapporte Lydie Thierry, présidente d’ Endat-TCA, l’Etablissement d’aide aux troubles du comportement alimentaire ( l’anorexie, la boulimie et l’hyperphagie boulimique). Une hausse que la psychologue Isabelle Siac, spécialiste de ces troubles, constate également à son cabinet : « Il y a eu un boom à la sortie du premier confinement, mais l’explosion a vraiment été avec le semi-confinement interminable à l’automne 2021. »

Sans surprise, selon les deux expertes, la tranche des 15-30 ans est particulièrement concernée par le phénomène. « Tout simplement parce que le pic de l’âge de début de ces troubles est entre l’adolescence et le début de l’âge adulte », explique la professeure Nathalie Godart, vice-présidente du Réseau TCA francilien et présidente de la Fédération française anorexie boulimie (FFAB). Mais aussi parce qu’à l’adolescence, durant laquelle on construit son identité par rapport aux autres, et pendant les années qui précèdent une vie de famille, les liens sociaux ont une place très importante.

« Privés de liberté, ils ont décompensé sur la nourriture »

Si le stress généré par la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 fait partie des facteurs de déclenchement des TCA, le grand coupable reste le confinement. « Un coup confiné, un coup déconfiné, un coup semi-confiné, un coup sous couvre-feu, etc. Cela a beaucoup perturbé le quotidien des jeunes, avance Isabelle Siac, auteure d’Un si vital sentiment d'insécurité. Certains ont réussi à s’adapter et trouver un nouveau rythme, d’autres pas. » La psychologue évoque les apéros à distance, les commandes trop fréquentes de repas préparés ou encore « des jeunes qui ont vu leur équilibre alimentaire perturbé en retournant dans leur famille ». Ainsi, les symptômes de ceux déjà atteints de TCA ont pu s’aggraver et ceux qui avaient simplement un rapport à la nourriture un peu problématique ont développé ces troubles diagnosticables.

« Privés de liberté ou de liens sociaux, ils ont décompensé sur la nourriture, dernier activateur de plaisir auquel ils avaient accès », analyse Lydie Thierry, concernant les cas d’hyperphagie boulimique. Les troubles anorexiques et boulimiques sont, eux, plutôt la conséquence d’une perte de cadre, de rituels du quotidien et de limites. « Certains se sont mis à manger des choses qu’ils n’auraient jamais mangées avant. L’une de mes patientes prenait de la glace le matin », donne en exemple celle dont l’association Endat-TCA a publié L’hyperphagie boulimique en 100 Questions/Réponses. Lydie Thierry note ainsi que les troubles alimentaires ont pu découler d’un « besoin de reprendre le contrôle et notamment de son corps par la nourriture ».

Rupture de soins et équipes débordées

Les confinements ont également empêché une bonne prise en charge des patients. Avec l’interdiction des déplacements, le suivi de soin des personnes qui souffraient déjà de TCA « a été compliqué, même avec les consultations vidéo », tranche Lydie Thierry. Et les patients qui ont commencé à souffrir de troubles alimentaires n’ont pas pu accéder aux soins précocement. « Aujourd’hui, les services sont confrontés à un accroissement des demandes de prise en charge extrêmement important. Le nombre de patients est plus important, tout comme la sévérité des troubles », rapporte Nathalie Godart. La psychologue Isabelle Siac assure voir de plus en plus de cas graves d’anorexie et de boulimie « avec des patients qui se font vomir jusqu’à cinq fois par jour ».

Les équipes de soin sont débordées car ces situations exigent plus de moyens humains, plus de temps, plus d’accompagnement. « Résultats, les personnes qui souffrent de TCA ont beaucoup de mal à trouver des soins et leur situation s’aggrave. C’est un cercle vicieux », déplore la professeure.

Télétravail et grignotages

La fin des confinement aurait-elle pu réguler le problème ? C’était compter sans le télétravail, généralisé dans un grand nombre d’entreprises. « Les salariés prennent leur pause déjeuner n’importe quand, mangent devant leur ordinateur en pilote automatique, constate Lydie Thierry. Ils se déconnectent des sensations alimentaires, de rassasiement et de satiété. Cela conduit au grignotage. »

Nathalie Godart, la présidente de la FFAB, rappelle qu’il est toujours possible de se tourner vers son médecin traitant, des pédiatres, des pédopsychiatres ou encore d’appeler la ligne d’écoute Anorexie boulimie info écoute au 0810 037 037. De son côté, la Défenseure des droits Claire Hédon a appelé ce jeudi, Journée mondiale des troubles des conduites alimentaires, la Première ministre Elisabeth Borne à mettre en place un plan d’urgence pour la santé mentale des jeunes face à « la gravité de la situation », estimant que des moyens « largement insuffisants » sont déployés.

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