« La grippe aviaire recombinée, adaptée à l'Homme, sera la prochaine pandémie » - Sud Ouest

Alors que le 1er avril, les autorités américaines confirmaient la contamination d’une personne par la grippe aviaire sur son territoire, infectée par un bovin, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a fait part ce 18 avril de son « énorme inquiétude » face à la propagation de la souche H5N1 de la grippe aviaire à de nouvelles espèces dont les humains. Entre le début 2003 et le 1er avril 2024, 889 cas humains ont été enregistrés dans 23 pays, dont 463 décès, soit un taux de létalité de 52 %.

Depuis plusieurs années, le Pr Hervé Fleury alerte sur la transmission du virus de grippe aviaire à l’Homme.

Sud Ouest

Comment le virus H5N1 est-il passé des oiseaux sauvages à l’humain ?

Ce virus H5N1 est parti de Chine et d’Asie du Sud-Est : les premiers cas humains ont été relevés en 1998. Il a gagné l’Europe, les États-Unis et a atteint l’Antarctique. Il a aujourd’hui une répartition géographique importante. Il a été véhiculé d’abord par les oiseaux sauvages qui au départ n’étaient pas malades. Il a muté. Et désormais ce nouveau variant qui domine tue les oiseaux. C’est d’ailleurs ce qui a été observé en France sur les dernières crises aviaires. Ces oiseaux sauvages transmettent ensuite aux oiseaux domestiques et ces derniers qui sont à proximité d’élevages transmettent à leur tour aux mammifères et aux mammifères domestiques. Les premiers d’entre eux sur le continent américain ont été des phoques au Chili ! On a observé aussi des cas chez les chats et les porcs et récemment un troupeau de bovins aux États-Unis. Et donc… on se rapproche de l’homme.

Est-ce que les décès humains recensés par l’OMS sont liés à la transmission directe de ce virus par les oiseaux et les mammifères ?

D’après ce que l’on connaît depuis 1998 à Hong Kong, les hommes sont contaminés essentiellement par les poulets et les canards domestiques. Et de temps en temps, ils sont contaminés par des mammifères chats et porcs. Et ce, partout. Il ne faut pas se faire d’illusions, dans le Sud Ouest de la France, un éleveur peut contracter le virus H5N1 par un de ses poulets ou canards, même si le contact entre le virus et l’arbre respiratoire supérieur de l’humain reste encore difficile. C’est d’ailleurs pourquoi il y a si peu de cas dans le monde. 889 cas à l’échelle mondiale, ça reste très faible. Néanmoins, l’inquiétude est importante car 52 % de ces cas ont donné lieu à des décès. Car ce que l’on constate est que lorsque le virus finit toucher les poumons, il détruit tout…

Pourquoi dans le Sud Ouest de la France, où la proximité entre élevages de volailles et élevages de bovins est courante, il n’y a pas eu de cas humains ?

Peut-être qu’il n’y a pas eu de contact entre le H5N1 et l’arbre respiratoire des éleveurs, ou peut-être que ça n’a pas été détecté. Je soupçonne les États-Unis d’avoir des surveillances très poussées et rigoureuses via leurs services vétérinaires. Ce qui leur a permis d’identifier une transmission de bovin à un homme sans que ce dernier n’ait été touché au niveau respiratoire. La manifestation de la maladie est seulement passée par une conjonctivite.

La transmission du H5N1 d’homme à homme a-t-elle été établie ?

Il y a eu en Asie, à Bangkok, en 2003, le cas d’une mère de famille contaminée et hospitalisée. En allant la voir à l’hôpital, son mari et des enfants, ont été à leur tour positifs.

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Doit-on redouter à terme, au gré des mutations du virus, une transmission humaine et donc une pandémie, comme celle qu’on a connue avec le Covid ?

Plus les événements se multiplient, plus le risque de voir un virus adapté à l’Homme s’élève. Le virus H5N1 peut se recombiner avec un virus grippal humain et c’est bien ce qui inquiète. On sait maintenant que la grippe de Hong Kong en 1968 était une recombinaison entre la grippe humaine de Singapour et une grippe de canards. Plus le H5N1 circule, plus il peut se recombiner avec un autre virus et plus le risque de pandémie se rapproche. On peut conseiller aux fermiers de se faire vacciner contre la grippe hivernale afin de diminuer la probabilité de recombinaisons. Je reste convaincu néanmoins que la grippe aviaire recombinée sera la prochaine pandémie.

Quels sont les points communs entre Covid et H5N1 ?

Tous deux circulent par voie aérienne ce qui est très inquiétant pour la transmission d’homme à homme et tous deux se sont adaptés à l’homme.

Vacciner les canards comme on le fait dans le Sud Ouest peut-il réduire les risques ?

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Le vaccin protège les canards, mais pas complètement car le virus continue de circuler dans l’élevage vacciné. Néanmoins, l’événement de recombinaison va baisser en statistiques mais il restera possible. Il faut savoir que le vaccin contre le H5N1 pour les humains est déjà en stock aux États-Unis. Moderna a annoncé un vaccin à ARN messager…

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