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Réimplantation des deux mains : "la récupération est longue et toujours imparfaite"

Une femme de 30 ans, dont les deux bras avaient été sectionnés par un train mi-août 2017, a pu être opérée à Grenoble deux heures après l'accident et ses membres réimplantés, a annoncé le Centre hospitalier universitaire Grenoble Alpes (CHUGA) le 24 août. Un succès que l'on doit à l'équipe médicale du service de chirurgie de la main, qui a ainsi réalisé la première réimplantation réussie bilatérale et simultanée de bras en France. Le 25 août, lors d'une conférence de presse, trois médecins du CHU sont revenus sur le déroulé de l'opération et ont donné des nouvelles de la patiente.

Une parfaite coordination entre le SAMU et le bloc opératoire

"Une double amputation des bras est un traumatisme relativement rare et c'est notamment pour cette raison que ce succès est une première en France, il n'y avait pas réellement de frein technique, admet le Dr Denis Corcella, chef de service chirurgie de la main au CHUGA. Toutefois, le cas s'était déjà présenté à Grenoble précédemment, mais un des membres était tellement délabré qu'un seul bras avait pu être réimplanté." Si c'est une première dans l'Hexagone, cette opération a déjà été réalisée ailleurs dans le monde à plusieurs reprises, notamment en Inde et en Chine.

Pas de difficultés techniques, certes, mais la réussite de l'opération a nécessité rapidité et parfaite coordination entre différents acteurs. "Il faut une parfaite coordination entre le SAMU, le transport médical et les centres "SOS mains", qui existent depuis une cinquantaine d'années et sont assez bien répartis en France, poursuit le chef de service. Médecins urgentistes, SAMU ou pompiers joignent le centre le plus proche et sont informés sur la manière de conserver et de transporter les segments amputés (dans un récipient propre avec de la glace). S'il y a mauvaise coordination, ou si le délai entre le traumatisme et l'intervention est trop long, la réimplantation devient impossible."

Des risques pour la patiente, mais pas celui d'un rejet

Grâce à cette coordination, et au parfait état de conservation des deux bras, la patiente a pu être admise au bloc opératoire à 17h, moins de deux heures après l'accident. "Cette rapidité diminue le risque de syndrome de reperfusion, qui peut engager le pronostic vital de la patiente et est plus important lorsque il y a deux membres amputés", précise le Dr Mickael Bouyer, assistant chef de chirurgie de la main au CHUGA. Ce syndrome regroupe tous les risques d'œdème tissulaire et autres conséquences dues à la recirculation brutale du sang dans un membre qui a subi un arrêt de circulation artérielle, à cause de l'amputation. S'en est suivi quatre heures d'une opération qui s'est déroulée en double équipe. "Les deux groupes ont travaillé en parallèle sur un bras et ont terminé en même temps, raconte le Dr Mickael Bouyer. En comptant les chirurgiens, assistants, infirmiers, anesthésistes, il y avait au moins une dizaine de personnes dans le bloc opératoire."

Mais après l'intervention, tout n'est pas gagné. Même s'il n'y a pas de risque de rejet - puisqu'il ne s'agit pas d'une greffe mais d'une réimplantation des membres du patient -,  d'autres complications peuvent survenir. "Il y a un risque de perfusion du membre, c'est pour cette raison que l'on ne se prononce pas sur l'état du patient avant une semaine, explique le Dr Mickael Bouyer. Peuvent aussi surgir des problèmes de cicatrisation cutanée, d'infection, de consolidation osseuse, puis à plus long terme, dans la récupération nerveuse."

La patiente "va plutôt bien et se remet progressivement de l'intervention"

C'est ce dernier point qui tracasse le plus les médecins. "La récupération fonctionnelle est longue et toujours imparfaite du fait des lésions nerveuses", souligne le Dr Denis Corcella. Dans le cas de la jeune femme, la réimplantation a eu lieu au niveau de l'humérus, l'os situé en haut du bras, ce qui ne facilite pas cette récupération. "Plus le segment est proche de l'épaule, plus la dégradation tissulaire est importante (due à l'absence de vascularisation), et moins cette réadaptation est bonne", précise le Dr Billy Chedal-Bornu, assistant chef de chirurgie de la main au CHUGA. Toutefois, "la patiente étant jeune, l'on peut penser que la récupération neurologique sera correcte", ajoute le chef de service. Selon ce dernier, elle "va plutôt bien et se remet progressivement de l'intervention".

Toutefois, sur le plan fonctionnel, la réimplantation des mains vaut mieux que des prothèses. "Mais c'est l'inverse pour des jambes amputées, précise le Dr Billy Chedal-Bornu. Pour les membres inférieurs, mieux vaut des prothèses qu'une réimplantation, cela laisse plus de chances de pouvoir remarcher normalement un jour." "L'adage que les médecins suivent est toujours "life before limb", la vie avant le membre", conclut le Dr Denis Corcella.

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