
Paris, le lundi 4 septembre 2017 – Le Président de la République, Emmanuel Macron, a martelé pendant sa campagne sa volonté d’insuffler dans le système de santé français la logique de la prévention. Pour atteindre cet objectif, renforcer la lutte contre le tabac qui a pêché à bien des égards au cours de la précédente mandature, ne peut être qu’une priorité. Déjà, quelques annonces ont été faites et notamment l’engagement d’augmentations significatives et répétées du prix du paquet de cigarette pour atteindre 10 euros dès 2020.
Par ailleurs, les conseillers santé d’Emmanuel Macron pendant la campagne avaient également défendu la nécessité de promouvoir des opérations positives. « Il s’agit de s’inspirer des pistes ludiques mises en place en Australie ou dans les pays du nord. On peut par exemple récompenser tel lycée, parce qu’il est le lycée qui compte le moins de fumeurs dans la région. C’est beaucoup plus motivant pour les jeunes, qui nous ont souvent proposés ce genre de choses » défendait par exemple dans nos colonnes le professeur Jérôme Salomon.
Menace terroriste vs risque sanitaire
Son exemple revêt des échos amers aujourd’hui, alors que certains redoutent que le ministère de l’Education nationale accorde plus de liberté aux proviseurs concernant l’application dans les lycées de l’interdiction de fumer dans les lieux publics. On le sait, les établissements scolaires ne souffrent aucune exception depuis le décret adopté en 2006 par Xavier Bertrand : il est totalement interdit de fumer dans leur enceinte y compris dans les espaces extérieurs. Cependant, au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, certains chefs d’établissement ont souhaité voir assouplie cette interdiction afin d’éviter que les jeunes fumeurs ne s’attroupement à heure fixe devant leur lycée et attirent ainsi d’éventuels projets macabres. Les proviseurs avaient bientôt pu s’appuyer sur des circulaires des ministères de l’Intérieur et de l’Education nationale pour légitimer leur option. Ces textes n’avaient cependant pas une valeur contraignante suffisante pour empêcher que, saisie par des associations de lutte contre le tabac, la justice administrative ne condamne par deux fois l’initiative des chefs d’établissement. Compte tenu de cette menace judiciaire et sous l’influence peut-être d’un émoussement de la conscience du risque terroriste, on comptait moins d’une dizaine de lycées qui avant les vacances continuaient à tolérer les fumeurs dans leur enceinte.
Ne pas sacrifier la santé des jeunes sur l’autel du risque terroriste
Que se passera-t-il cette année alors que plus de deux millions de lycéens font leur rentrée aujourd’hui ? Selon plusieurs médias, dont RTL, le ministère de l’Education nationale envisagerait de permettre aux proviseurs de faire le choix d’aménager des zones fumeurs. Au sein du ministère, on signale cependant qu’aucune décision n’a été actée et que les discussions de vendredi sur ce sujet étaient informelles. Néanmoins, l’inquiétude est forte au sein des associations de lutte contre le tabac alors qu’aujourd’hui 33% des garçons et 30% des filles de 17 ans fument de façon régulière, un taux qui est un des plus élevé des pays occidentaux. « La sécurité sanitaire de nos jeunes compatriotes ne peut être sacrifiée sur l’autel du risque terroriste » écrivait ainsi le Comité national contre le tabagisme (CNCT) dans un communiqué dès jeudi soir. « On interdit de fumer dans les établissements scolaires car c’est efficace pour la dénormalisation du tabac : ce n’est pas un produit banal, c’est un produit qui tue. Il faut prévenir la consommation car on commence en général à fumer entre 14 et 18 ans » a précisé le président du CNCT, le docteur Yves Martinet, à l’antenne de BFM TV.
Double emploi contre le tabac et le terrorisme : interdire de fumer devant le lycée !
D’autres solutions, plutôt que le retour du tabac dans les lycées, sont possibles, martèlent les associations, soutenues par le ministère de la Santé. « Les participants à la réunion [de vendredi ndrl] ont par exemple évoqué la possibilité d'interdire de fumer devant les lycées » indique ainsi un collaborateur du ministère de la Santé cité par l’Express. Cette mesure est appliquée dans d’autres pays et permet une dénormalisation plus complète du tabac. L’exposition à la cigarette dans le cadre scolaire demeure en effet importante, en dépit des interdictions : selon des chiffres concernant l’année 2014 (soit avant les mesures ponctuelles d’assouplissement), publiés dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) au printemps 2016, « plus de trois quarts (76,8 %) des lycéens et étudiants de plus de 15 ans ont déclaré avoir été exposés à la fumée de tabac des autres à l’école, au lycée, à l’université, au cours des 30 derniers jours ». Des chiffres qui ne signifient sans doute pas qu’autant de jeunes gens étaient confrontés au tabagisme dans l’enceinte de leur établissement, mais qui marquent qu’ils considèrent les cigarettes fumées devant le lycée comme une exposition réelle… Avec l’interdiction de s’en griller une devant les établissements, il pourrait être possible de faire coup double contre d’une part le risque terroriste et d’autre part un fléau qui tue bien plus encore que lui.
Aurélie Haroche
http://www.jim.fr/en_direct/pro_societe/e-docs/fumer_a_linterieur_des_lycees_les_proviseurs_bientot_autorises_a_faire_feu_sur_la_lutte_anti_tabac__167362/document_actu_pro.phtmlBagikan Berita Ini
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