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Sexisme, harcèlement sexuel: Pourquoi les internes subissent tant ses comportements

Une illustration d'une opération à l'hôpital.

Une illustration d'une opération à l'hôpital. — deborabalves/Pixabay

  • Les internes sont très touchés par le sexisme au quotidien et subissent aussi parfois du harcèlement sexuel.
  • Les rapports de force expliquent ces comportements déplacés.
  • Il existe encore une omerta à l’hôpital sur ces questions.

Blagues graveleuses, gestes déplacés, SMS salaces, harcèlement sexuel… Les étudiants en médecine sont souvent victimes de ces comportements à l’hôpital. En témoigne l’enquête dévoilée ce vendredi par l’Intersyndicale nationale des internes  (Isni). Selon celle-ci, la moitié (47%) des répondants se déclare victimes de sexisme quotidien et 9% disent avoir subi une forme de harcèlement sexuel.

>> A lire aussi : Harcèlement sexuel au travail: «La bonne question, c'est "comment se fait-il que malgré toutes les difficultés, quelques victimes en parlent?"»

Des chiffres qui ne reflètent pas l’étendue du problème, selon le président de l’Isni, Olivier Le Pennetier, « car beaucoup de personnes ont tendance à minimiser ce qu’elles subissent, tant ces comportements déplacés ont tendance à se banaliser ». Un avis partagé par le docteur Valérie Auslender, médecin généraliste attachée à Sciences Po, et auteure Omerta à l’hôpital, dans lequel elle dénonçait les maltraitances subies par les étudiants en santé. « J’ai reçu beaucoup de témoignages et j’ai moi-même été témoin de ce genre de situations lorsque je travaillais à l’hôpital. Comme ces jeunes femmes que les médecins arrosaient de sérum physiologique en leur demandant de se prêter à un concours de tee-shirts mouillés. Ou cette interne, agressée sexuellement par son supérieur hiérarchique, qui lui faisait du chantage. Ou bien cette autre jeune femme, qui avait tiré son lait pour le donner à son bébé et que ses collègues ont bu par défi », énumère le médecin.

Certains médecins évoquent l’esprit carabin

En octobre, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, avait d’ailleurs elle-même confié avoir été victime de « comportements très déplacés » lorsqu’elle travaillait à l’hôpital, avec des chefs de service qui lui disaient : « Viens t’asseoir sur mes genoux », ce qui faisait « rire tout le monde ».

>> A lire aussi : «Omerta à l'hôpital»: Les raisons du mal être des étudiants de santé

Des agissements imputés dans la plupart des cas aux médecins, selon l'enquête de l'Isni. « Dans les cas de harcèlement sexuel, il y a toujours une notion de pouvoir. Les femmes internes sont particulièrement vulnérables, car les chefs de service ont le pouvoir de valider ou non leurs stages », précise Olivier Le Pennetier. « Si ces comportements déplacés sont entrés dans les mœurs, c’est aussi parce que l’esprit carabin se perpétue. Certains médecins revendiquent cet humour gras en disant qu’il leur permet de se défendre face à la souffrance des patients. Mais ils oublient que leurs réflexions à connotation sexuelle finissent par se transformer en agressions verbales », estime Valérie Auslender.

Des effets parfois désastreux sur les carrières

Et si le phénomène atteint une telle ampleur à l’hôpital, c’est aussi parce qu’il y règne la loi du silence : « Les victimes n’en parlent à personne car elles ont honte de ce qu’elles ont subi », observe Olivier Le Pennetier. « Et comme tous les étages de l’hôpital sont touchés, de l’aide soignante, à l’infirmière, les internes se taisent comme les autres », constate Valérie Auslender.

Des actes répétés qui ont pourtant des conséquences graves sur ceux et surtout celles qui les subissent. « Certains internes, déstabilisés, ont du mal à se concentrer, à prendre en charge leurs patients. J’ai vu des jeunes femmes faire une pause dans leurs études de médecine, voire les abandonner, car elles n’en pouvaient plus », témoigne Valérie Auslender.

« Une jeune interne s’est coupé les cheveux pour ne plus être importunée »

D’autres adoptent des stratégies de camouflage pour devenir transparentes : « Je me souviens d’une jeune interne qui s’est coupé les cheveux et a adopté le jean/basket pour ne plus être importunée », évoque le médecin. Et les remarques sexistes répétées peuvent finir par transformer l’image que certaines internes ont d’elles-mêmes, comme le souligne Olivier Le Pennetier : « A force, elles en viennent à s’autolimiter et se heurtent à un plafond de verre dans leur carrière. »

Des solutions existent pourtant pour faire bouger les mentalités à l’hôpital. « Il faut d’abord créer des cellules d’écoute qui permettent aux internes de se confier. Et les directeurs des hôpitaux doivent exiger une tolérance zéro face aux agressions sexistes et sanctionner les auteurs de ces actes », insiste Valérie Auslender. Martin Hirsh, le directeur de l’AP-HP, a fait un premier pas dans ce sens en reconnaissant les phénomènes de harcèlement sexuel à l’hôpital.

« Et quelques initiatives se mettent en place dans les hôpitaux, comme au CHU de Thuir (Pyrénées-Orientales), qui a lancé une campagne de communication contre le sexisme dans les structures de soins », informe Olivier Le Pennetier. « Mais il en faudrait plus et impérativement évoquer cette question dans la formation intiale des médecins », soutient Valérie Auslender.

*Omerta à l’hôpital, Valérie Auslender, (Ed. Michalon), 21 euros.

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