SANTE - Commerces fermés, liaisons maritimes coupées... L'archipel des Iles Samoa, dans le Pacifique Sud, a mis en place une campagne de vaccination sans précédent pour tenter de faire face à une épidémie de rougeole ayant déjà tué 63 personnes, dont 55 enfants. Face au péril, les autorités ont fait arrêter un militant anti-vaccin.
- La rédaction de LCI
Les 200.000 habitants des îles Samoa étaient en quarantaine ce vendredi 6 décembre pour la seconde journée d'affilée, afin de mener à bien une gigantesque campagne de vaccination. L'objectif : lutter une épidémie de rougeole ayant déjà tué 63 personnes.
Afin de n'oublier personne, les autorités de cet archipel du Pacifique sud avaient ordonné la fermeture de tous les commerces et services gouvernementaux non essentiels, coupé la liaison inter-îles par ferry et demandé aux véhicules privés de ne pas circuler durant ces deux jours. Des équipes de vaccination ont alors ratissé tout le territoire, faisant du porte-à-porte. Pour faciliter l'opération, les personnes non-vaccinées contre la rougeole avaient été invitées à afficher un drapeau ou une étoffe rouge devant leur domicile pour aider les équipes médicales à les repérer.
4 357 cas de contamination recensés dans l'archipel
Depuis le début de l'épidémie mi-octobre, 63 personnes, dont 55 d'enfants de moins de quatre ans, sont décédés dans l'archipel. Les enfants sont aussi majoritaires parmi les 4.357 cas de contamination recensés, et vingt d'entre eux sont actuellement hospitalisés dans un état critique.
Seulement 30% de la population était vaccinée avant le début de l'épidémie. Les autorités estiment que ce chiffre est remonté à 55% grâce à une première campagne de vaccination commencée il y a 15 jours, auprès des enfants. La nouvelle campagne, élargie à toute la population ce jeudi et vendredi, est rendu possible grâce à l'état d'urgence décrété le mois dernier. Elle est censée "porter ce taux à plus de 90% et faire refluer l'épidémie", espère Sheldon Yett, le représentant régional de l'Unicef dans le Pacifique. "J'avais déjà vu des campagnes de mobilisation massives, mais jamais à travers tout un pays comme ça", a-t-il confié à l'AFP. "Les rues sont vides. Les gens restent chez eux et attendent la campagne de vaccination, le pays entier est en train de se faire vacciner". Il faut cependant attendre 10 à 14 jours pour qu'il soit efficace.
Les anti-vaccins accusés de la situation critique
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) accuse des campagnes anti-vaccins d'avoir fait chuter la couverture vaccinale aux Samoa avant l'épidémie. L'an dernier, la mort de deux bébés après un vaccin anti-rougeole avait affolé les parents et interrompu le programme national de vaccination durant 8 mois. Une enquête avait ensuite innocenté le vaccin : il n'était pas en cause mais avait été administré mélangé avec des produits anesthésiants au lieu d'eau. Malgré l'évidence de l'erreur médicale, les anti-vaccins ont sauté sur l'occasion pour répandre leur message.
"Nous avons eu des enfants décédés car amenés à l'hôpital trop tard, en dernier recours. Nous avons découvert que le message anti-vaccin avait été transmis à leurs familles, qui avaient ensuite gardé ces enfants à la maison", a regretté le ministre de la Communication de l'archipel, Afamasaga Rico Tupai. "Les anti-vaccins malheureusement nous ralentissent", a-t-il affirmé à la télévision néo-zélandaise TVNZ. S'adressant ensuite directement à eux, le ministre a notamment déclaré : "Ne vous mettez pas en travers du chemin, ne contribuez pas au nombre de décès".
Depuis jeudi, les autorités Samoa ont donc averti qu'elles ne toléreraient aucune désinformation de la part de ces mouvements militants. "Nous conseillerons à la police d'agir quand nous n'aurons pas le choix", a notamment assumé le procureur général de l'archipel dans un communiqué. Le gouvernement a ainsi annoncé l'arrestation d'un militant connu et particulièrement virulent concernant les vaccins, Edwin Tamasese. Sur les réseaux sociaux, il avait écrit à propos de la campagne massive de vaccination : "profitez bien de votre orgie de meurtres".
Les réseaux sociaux ont-ils leur part de responsabilité ?
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Sheldon Yett, a ainsi appelé les réseaux sociaux "à la responsabilité" pour sévir contre la prolifération de ces messages anti-vaccin. Selon lui, ces campagnes militantes sont souvent menées depuis des pays riches comme les Etats-Unis ou l'Australie, par des individus n'ayant pas conscience de leur impact sur les pays pauvres. "C'est dévastateur, cela peut condamner à mort un enfant ici où le taux de vaccination est faible et où s'ajoutent d'autres problèmes de santé", estime le représentant régional de l'Unicef dans le Pacifique.
La semaine dernière, un blogueur a comparé depuis l'Australie la vaccination obligatoire à Samoa à des pratiques nazies, quant d'autres internautes ont préconisé de soigner la rougeole avec des remèdes alternatifs à l'efficacité non prouvée. Si la priorité des Iles Samoa est de maîtriser l'épidémie, "une discussion va s'imposer avec les géants d'internet comme Facebook, Twitter et Instagram utilisés par les anti-vaccins", a insisté M. Yett . "Il est très clair qu'ils doivent exercer une responsabilité d'entreprise pour intervenir et faire en sorte que les populations, particulièrement les plus vulnérables, obtiennent une information correcte qui contribuera à garder les enfants en vie".
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Les Iles Samoa ont reçu l'aide de l'ONU et de plusieurs pays - comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Grande-Bretagne, la Chine, la Norvège, le Japon, les Etats-Unis et la France - pour mener à bien cette vaccination massive. Les autorités locales souhaitent imiter les archipels voisins de Tonga et Fidji, où la couverture vaccinale approche 90%. La-bas, des épidémies de rougeole se sont aussi déclarées mais sans faire de victimes.
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