La communauté scientifique applaudit les travaux de DeepMind, filiale de Google qui, grâce à un modèle d'intelligence artificielle, est aujourd'hui en mesure de prédire la structure des protéines avec une précision inégalée. De quoi accélérer d'innombrables recherches.
Filiale de Google, le laboratoire de recherche en intelligence artificielle DeepMind — connu pour avoir créé des IA capables de battre les plus grands champions de go ou de Quake III — vient de créer une carte des protéines humaines dont toutes les données sont disponibles gratuitement. Un projet rendu possible grâce à l'intelligence artificielle, dont l'impact pourrait être aussi important que celui qui vise à cartographier tous les gènes humains, selon des représentants éminents de la communauté scientifique. Venki Ramakrishnan, lauréat en 2009 du prix Nobel de chimie, évoque ainsi dans un communiqué une “percée incroyable, cela s’est produit bien plus tôt que de nombreux experts ne l’auraient prédit. Cela va être passionnant de voir les nombreuses façons dont la recherche biologique va changer radicalement”.
Les protéines sont de longues molécules complexes qui exercent d'innombrables fonctions dans le corps humain, caractérisées par leur forme, leur structure et la manière dont elles se plient. L'étude des protéines et la compréhension de la manière dont elles se plient en fonction de leur objectif est très utile pour les scientifiques, qu'il s'agisse de scruter le fonctionnement du corps humain ou le développement de maladies, sans oublier la création de traitements ou de médicaments, par exemple contre la Covid.
Des années de recherche gagnées
Pour éviter aux scientifiques de longues et coûteuses expériences afin de déterminer la forme des protéines (la structure d'une seule d'entre elles peut actuellement prendre plusieurs mois ou années), DeepMind a imaginé un modèle d'intelligence artificielle baptisé AlphaFold2, capable de prédire avec beaucoup de justesse la structure de ces grosses molécules complexes. Une IA qui a appris par elle-même et s'est enrichie jusqu'à atteindre son niveau de précision actuel, permettant à DeepMind de publier des centaines de milliers de prédictions.
Interrogé par The Verge, Demis Hassabis, cofondateur et directeur de DeepMind, explique voir ce bond en avant comme “le point culminant de plus de 10 ans de travaux divers et variés”. “Depuis le début, c'est le but que nous recherchons : réussir des avancées majeures grâce à l'IA, les tester sur des jeux et les appliquer ensuite à des problèmes du monde réel pour voir si nous pouvons accélérer la recherche scientifique et les utiliser au bénéfice de l'humanité”, ajoute-t-il.
La semaine dernière, l'entreprise londonienne a publié dans la revue scientifique Nature sa méthodologie et les grands principes de ses algorithmes, démontrant être capable de prédire la structure des protéines presque parfaitement. Dans un second article, DeepMind a prouvé être en mesure de prédire la structure de 60 % des acides aminés au sein du corps humain, tout en démontrant l'efficacité de son IA sur d'autres organismes (des essais concluants ont été menés sur les souris, les mouches et la bactérie intestinale E.coli). S'est ensuivie la mise en ligne des prédictions de structures pour 350 000 protéines dans une base de données hébergée par le laboratoire de biologie moléculaire de l'European Bioinformatics Institute.
Edith Heard, directrice de ce laboratoire, ne cache pas son enthousiasme : "La prédiction précise de leurs structures a un large éventail d'applications scientifiques, allant de la mise au point de nouveaux médicaments et traitements pour les maladies à la conception de futures cultures capables de résister au changement climatique, ou d'enzymes en mesure de dégrader les plastiques […] Les applications ne sont limitées que par notre imagination”.
200 millions de protéines dans le viseur
D'un point de vue purement médical, des protéines à la structure altérée peuvent être responsables du développement de maladies telles que celles d'Alzheimer et de Parkinson. Pouvoir prédire la forme d'une protéine pourra aider les scientifiques à la contrôler et altérer afin d'améliorer ses fonctions en modifiant sa séquence ADN, ou bien concevoir des médicaments la ciblant directement.
À l'heure actuelle, quelque 180 000 protéines auraient été analysées sur les plus de 200 millions connues dans les organismes vivants. Raison pour laquelle la prédiction fiable de leur structure est considérée comme l'un des plus grands défis en biologie. “Notre ambition est d'étendre la base de données à l'ensemble de l'univers des protéines, soit plus de 200 millions de protéines, dans les mois à venir”, fait savoir Demis Hassabis de DeepMind. Seule limite, les protéines sont des molécules dynamiques qui changent constamment de structure en fonction de leur environnement, alors que l'algorithme de DeepMind ne peut prédire qu'une structure statique.
“Ce fut l'un de ces moments où mes poils se sont hérissés […] Nous sommes en mesure d'utiliser ces informations pour accélérer le développement d'enzymes capables de digérer le plastique. Nous venons tout simplement de gagner plusieurs années de travail”, se réjouit John McGeehan, directeur d'un pôle de recherche sur les enzymes à l'Université de Portsmouth, qui a pu tester AlphaFold ces derniers mois. Celui-ci loue également la mise à disposition des travaux de DeepMind en open source, accessibles donc au plus grand nombre, ce qui ne manquera pas d'accélérer les recherches scientifiques dans de nombreux champs applicatifs. Et valoir à Google un prix Nobel par DeepMind interposé ?
Sources : DeepMind, The Financial Times, The Verge
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