Selon une étude contestée par des patients et des médecins, les symptômes physiques persistants après l'infection au Covid-19 "pouraient le plus souvent être associés au fait de croire avoir été infecté" au coronavirus.
Des mois après la contamination, certains patients touchés par le Covid-19 continuent de vivre avec des troubles persistants. Fatigue, troubles neurologiques, douleurs et oppression thoraciques, odorat et goût impactés... Les personnes affectées par un "Covid long" présentent une myriade de symptômes, longtemps après avoir été touchés par la maladie.
Mais d'après une étude publiée ce lundi dans la revue scientifique JAMA Internal Medicine et dont les résultats provoquent l'ire des associations de patients et la contestation de certains professionnels de santé, les symptômes physiques continuant longtemps après l'infection au Covid-19 "pourraient le plus souvent être associés au fait de croire avoir été infecté".
Autrement dit, le Covid long serait surtout d'ordre psychologique, sans lien avec la réalité d'une infection au virus, et donc avec des séquelles physiologiques.
Kits de sang et questionnaires
Interrogé par nos confrères du Monde, l'un des auteurs, Cédric Lemogne, chef du service psychiatrie de l'adulte à Hôtel-Dieu (Paris), précise que leurs conclusions ne sous-entendent en aucun cas que "ces symptômes n'existent pas" ou que "les troubles rapportés par les patients sont imaginaires ou nécessairement psychosomatiques". "Puisqu'(ils) les ressentent, ces symptômes existent par définition", ajoute-t-il.
Cette analyse porte sur 26.823 adultes français, piochés au sein de la cohorte Constances, la plus grande cohorte épidémiologique de France. Entre mai et novembre 2020, des kits d'auto-échantillonage de sang ont été envoyés aux participants. Ils ont ensuite été testés.
Puis, entre décembre 2020 et janvier 2021, ils ont reçu un questionnaire leur demandant s'ils pensaient avoir été infectés par le virus, quels symptômes ils expérimentaient ces derniers mois et s'ils pensaient qu'ils étaient en lien avec le Covid-19.
La conviction d'avoir contracté la maladie
En analysant les données, ils ont conclu que la conviction d'avoir contracté le coronavirus était associée à un risque accru de ressentir 15 des 18 symptômes les plus courants du "Covid long". En revanche, avoir un test positif au Covid-19, indépendamment des croyances du patient, n'était associé qu'à un seul symptôme: l'anosmie, c'est-à-dire la perte de l'odorat.
Si l'étude est explosive, tant il est difficile pour les personnes souffrant de manifestations de "Covid long" de trouver une prise en charge adaptée, les auteurs précisent qu'une "évaluation médicale de ces patients peut être nécessaire pour prévenir les troubles dus à une autre maladie et attribués à tort à un 'Covid long'".
Une étude "préjudiciable pour les patients"
#ApresJ20, association Covid Long France, estime que la publication fait "l'objet d'interprétations (...) préjudiciables pour les patients et les professionnels de santé".
"Cette étude dans le journal Jama repose en très grande partie sur le fait que la sérologie (le dosage d'anticorps) serait un élément suffisant pour distinguer les personnes infectées de celles qui ne l’ont pas été. Cependant, cette même sérologie est désormais reconnue comme un indicateur assez peu fiable sur la durée chez les malades du Covid long. Des études ont en effet montré que la réponse par anticorps pouvant s'effacer d'autant plus que les symptômes persistent", écrit l'association.
Certains professionnels de santé ont aussi réagi négativement à la publication à l'instar de Jérôme Larché, spécialiste en médecine interne, qui tance un "biais de confirmation flagrant". C'est la principale objection contre cette étude. Un test sérologique a plus de risque de "rater" un Covid passé que d'en faire état par erreur, ce qui biaise les résultats.
"Effacer toute cette réalité complexe, en évolution permanente, derrière le terme de 'croyances' montre qu'ici, les croyants ne sont assurément pas les patients Covid long ni les médecins qui les prennent en charge", s'indigne-t-il.
Le "Covid long", une définition trop vague
Cette polémique fait ressortir la difficulté à cadrer les recherches sur le sujet. De nombreux symptômes sont associés à ce trouble, parmi lesquels la fatigue ou l'essoufflement, ce qui rend difficile de déterminer à quel point les "Covid longs" recouvrent différentes réalités et, à plus forte raison, quelle peut en être l'origine.
Dans ce contexte, l'étude polémique du Jama risque d'être instrumentalisée "pour affirmer que (le Covid long) n'est absolument pas un problème", redoute le médecin américain F. Perry Wilson, professeur à Yale, sur le site Medscape.
Mais, tout en se montrant lui aussi très critique sur l'étude, il met en garde sur un problème de fond quant à la définition trop vague du "Covid long".
"Nous devons nous rendre compte qu'avec des symptômes vagues, on obtient des diagnostics vagues", conclut-il. "Faute de critères plus stricts, de nombreuses personnes risquent de recevoir une étiquette 'Covid long' alors qu'elles n'en sont pas du tout atteintes".
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