Pour s’y retrouver au milieu des discours contradictoires et recettes miracles, mais aussi, rassurer ceux qui angoissent d’avance à l’idée du réveillon, nous avons passé au crible onze idées reçues autour des fêtes de fin d’année avec Marion Hervé, diététicienne-nutritionniste en Gironde*.
1. “Après les fêtes, c’est détox obligatoire”
L’avis de Marion Hervé : La détox qu’on nous vend dans le commerce n’existe pas, c’est du vent. En revanche, nous avons naturellement un organe qui fait très bien la détox, c’est le foie. C’est même son rôle principal dans l’organisme. Il faut simplement faire confiance à notre corps, à notre foie, et tout va bien se passer. Il n’y a rien de miraculeux, tout ce qui existe dans le commerce, ce n’est que du marketing.
2. “Après les fêtes, je jeûne pour ‘rattraper le coup’”
L’avis de Marion Hervé : Aucune étude scientifique n’a pour l’heure prouvé l’efficacité du jeûne après les fêtes. La seule chose que je peux vous conseiller, c’est d’écouter votre corps, écouter vos sensations. Il est fréquent qu’on n’ait pas faim, naturellement, le lendemain d’un repas très copieux. Dans ce cas-là, il faut s’écouter, et surtout s’hydrater. Après, sur les repas suivants, il suffit de reprendre une alimentation plutôt normale. Le jeûne en tant que tel n’est pas spécialement recommandé.
3. “En décembre, c’est régime jusqu’à Noël”
L’avis de Marion Hervé : Cette idée est plutôt contre-productive, parce qu’elle va créer une frustration. Si c’est un jeûne, en totale restriction, quand les fêtes vont arriver, le corps va envoyer des signaux pour dire “il faut que je mange, que je compense”, créer des fringales et stocker les calories ingérées. Et si on est en restriction du genre “je ne mange que de la salade les jours avant Noël”, c’est pareil, ça ne va faire qu’accentuer une frustration, qui va se traduire par le fait qu’on mangera peut-être davantage qu’on aurait mangé naturellement aux repas des fêtes, en plus grosses quantités et de manière plus compulsive.
Il vaut mieux continuer ses repas tels qu’on a l’habitude de les faire, et pendant les repas de fêtes, manger un peu de tout, se faire plaisir. Le but c’est de profiter, de manger des aliments qu’on ne mange pas généralement le reste de l’année, donc les apprécier. Le mieux est de manger des petites quantités d’un peu de tout, et écouter ses sensations, sa satiété, son rassasiement. Par exemple, si je n’ai plus faim, je ne vais pas forcément me resservir parce que ça fait plaisir à la personne qui nous reçoit...
4. “De toute façon, on prend forcément du poids pendant les fêtes”
L’avis de Marion Hervé : Le chiffre sur la balance peut évidemment augmenter d’un jour à l’autre pendant les fêtes, mais ce n’est pas une prise de masse grasse, parce que la masse grasse, elle, elle se fait sur le long terme : quand nos apports sont supérieurs à nos besoins sur une longue période, le corps va stocker. Pendant les fêtes, cette sensation de prise de poids, ça va surtout être de la rétention d’eau, parce que souvent les repas vont être plus salés, plus sucrés, et en fait c’est un phénomène chimique, un phénomène d’osmose : lorsqu’on mange plus riche, on retient plus l’eau. Donc oui, on va faire de la rétention d’eau, prendre 2-3 kilos sur la balance, mais si on reprend ses habitudes après les fêtes, ce poids va être reperdu très rapidement. Ce ne sont pas des kilos ancrés.
5. “C’est impossible de se faire plaisir sans excès”
L’avis de Marion Hervé : Je suis plutôt d’avis de dire qu’il faut profiter sans culpabiliser, puisque c’est une période qui est exceptionnelle, avec des aliments qu’on ne mange pas forcément au quotidien. Après, évidemment, manger en quantité modérée, c’est mieux pour le corps, pour l’organisme ou pour la digestion. Mais chacun est libre de manger comme il le souhaite. Il faut simplement savoir que ce n’est pas la quantité qui va faire le plaisir alimentaire. On n’est pas obligé de manger en excès pour pouvoir apprécier, mais vous pouvez sans problème goûter un peu de tout ce qui est présent sur la table, profitez : ça n’arrive qu’une fois dans l’année.
6. “Le foie gras est interdit si on a du cholestérol”
L’avis de Marion Hervé : Le foie du canard est, comme pour l’homme, l’organe “filtre” de l’organisme, qui va détoxifier ce qu’il ingère. De plus, le foie animal que l’on mange est un foie malade, qui est rempli de graisses. C’est donc un aliment très riche. Mais ce n’est pas comme du gras de porc, qui ne va comporter que des graisses saturées : le gras de canard comporte aussi des graisses insaturées, qui ne sont pas des mauvaises graisses. Cela reste un produit très calorique, mais je ne le déconseille pas à mes patients qui ont du choléstérol, parce que ça reste du domaine de l’exceptionnel, du plaisir. Si le foie gras était consommé au quotidien, bien sûr qu’il faudrait le limiter en cas de cholestérol, mais pour un repas, ça va.
7. “Boire beaucoup d’eau, surtout gazeuse, aide à digérer”
L’avis de Marion Hervé : Boire beaucoup d’eau, oui. Gazeuse ou non, ça c’est plutôt selon les goûts et tolérances de chacun. L’eau gazeuse n’est pas tolérée par tout le monde, elle peut ballonner au contraire, donc je ne suis pas forcément pour. Et puis elle n’a pas de propriétés supérieures à l’eau classique, pour cette période-là en tout cas. Mais boire beaucoup, c’est efficace, oui, parce qu’on mange plus gras, plus salé et plus sucré, donc on a besoin de s’hydrater pour drainer tout ça et aider le foie dans son travail, puisqu’il en a pas mal à ce moment-là.
Côté alcool, ça aide bien aussi, car ce dernier déshydrate le corps. Donc le mythe “un verre d’alcool, un verre d’eau” se vérifie, dans ces cas-là. L’alcool est évidemment à consommer avec modération, mais on sait que les fêtes sont une période où on boit davantage. Boire de l’eau tout au long du repas, ça va vraiment changer la donne sur notre confort digestif et notre ressenti du lendemain.
8. “Le trou normand ou le digestif de fin de repas aident à digérer”
L’avis de Marion Hervé : Non. Ca c’est un gros mythe. Ca reste de l’alcool, qui va freiner la digestion et qui va donner encore plus de travail au foie, donc c’est une idée reçue, complètement. Le digestif n’a de digestif que le nom.
9. “La volaille sera toujours moins grasse que la viande rouge ou le gibier”
L’avis de Marion Hervé : Les volailles sont les viandes les plus maigres, donc effectivement, c’est plutôt vrai par rapport à la viande rouge, qui est souvent persillée, c’est-à-dire avec du gras à l’intérieur. Le gibier, lui, est assez maigre, il y a très peu de gras, sauf si on parle du sanglier pour le coup. Mais au-delà de la viande, tout dépend de la sauce, de la préparation… une viande grillée sera forcément plus légère qu’une viande en sauce.
10. “Le champagne est moins calorique que le vin”
L’avis de Marion Hervé : C’est le degré d’alcool qui définit l’apport calorique d’une boisson, et le champagne est plus alcoolisé que le vin, donc non, le champagne n’est pas moins calorique que le vin, sous ses airs légers. Le côté frais n’empêche pas qu’il soit plus fort, et donc plus calorique.
11. “La bûche glacée est moins riche que la bûche pâtissière”
L’avis de Marion Hervé : Les bûches pâtissières vont souvent être faites à base de crème au beurre donc plus riches, plus lourdes en fin de repas. Les bûches glacées peuvent avoir l’aspect plus léger, plus frais, mais une crème glacée peut être très sucrée, très grasse et très transformée aussi. Donc il vaut mieux choisir celle qui nous fait plaisir, surtout. La bûche pâtissière est sûrement un peu plus élevée, puisqu’il y a le biscuit, la crème au beurre… mais tout dépend de ce qui nous fait plaisir.
Globalement, comment aborder les fêtes ?
Marion Hervé : Ce que je répète le plus, c’est de profiter et ne pas culpabiliser. Enfin essayer, je sais que ce n’est pas contrôlé chez les personnes qui abordent ces fêtes avec plus de craintes que de joie. Mais vraiment, les fêtes, c’est une période dans l’année, c’est un moment de partage, souvent festif, agréable, où on va forcément manger un peu plus, mais ça représente 1% de l’année. Alors faites-vous plaisir.
Si vous voulez être un peu vigilant, respectez surtout vos signaux de satiété, de rassasiement, parce qu’on les oublie un peu, on se ressert pour faire plaisir… donc rester maître de ses choix, savoir refuser quand on a plus faim, ne pas aller au-delà, c’est déjà suffisant. Et puis profitez des pauses entre les repas, s’il y en a pour aller vous promener, si ça vous fait plaisir. Du coup vous pourrez digérer un peu mieux. Et puis, dites-vous que les bonnes habitudes, on les reprend en janvier, et c’est elles qu’on suit toute l’année, donc on a bien le droit sur une petite période, de les transgresser sans se prendre la tête.
En janvier, alors, on fait quoi ?
Marion Hervé : Bougez le plus possible, constituez vous des repas complets et équilibrés avec protéines, féculents, légumes, matières grasses, augmentez votre consommation en fruit et légumes frais, en légumineuses et en fruits secs. Privilégiez les graisses végétales pour vos assaisonnements (huile de noix, huile de colza, huile de lin). Diminuez votre consommation de viande rouge : non elle n’est pas à bannir elle nous apporte des protéines de bonnes qualités et du fer, mais pas tous les jours.
Réduisez votre consommation en sucres ajoutés : le sucre fait partie du plaisir et doit rester présent dans notre alimentation, mais en excès sa consommation est délétère pour notre corps. Enfin, augmentez votre hydratation : 1,5L d’eau par jour au minimum, pour aider vos organes à fonctionner normalement, mais aussi réduire la fatigue, améliorer votre concentration, votre transit, et réguler les éventuelles compulsions alimentaires.
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