Près d'un pharmacien sur quatre (24%) donne des conseils dangereux aux patients qui, pour soigner leur rhume, achètent du paracétamol en automédication, autrement dit sans ordonnance du médecin, dénonce une enquête de l'association de consommateurs UFC-Que choisir. Réalisée auprès de 772 officines dans 16 agglomérations, elle a été présentée le 21 mars 2018 lors d'une conférence de presse.
Les pharmacies ont été testées sur les dangers liés à l'association de deux médicaments contenant du paracétamol (antalgique contre la fièvre et les douleurs) : le Doliprane® 1.000 mg et l'Actifed® rhume jour et nuit. "Dans 86% des cas, l'alerte a bien été spontanément donnée", a indiqué Daniel Bideau, responsable du réseau santé de l'UFC-Que choisir. "Mais la posologie finalement conseillée est souvent surdosée en paracétamol présent dans les deux médicaments en question", a-t-il ajouté.
"Situation de risque"
Le conseil dangereux donné par un quart des pharmaciens se traduit par une dose nocive de paracétamol, "supérieure à 4 grammes par jour", ce qui peut avoir de graves conséquences, notamment sur le foie. L'association de consommateurs dénonce "une situation de risque pour l'usager ", poursuit Daniel Bideau.
Sans s'en rendre compte, une personne peut très vite dépasser la dose maximale de paracétamol indiquée quotidiennement, soit 3 mg par jour. Un traitement Actifed® comprend quatre gélules de 500 mg de paracétamol à prendre le matin, le midi, le soir et au coucher, soit un total de 2 grammes sur une journée. Le patient n'a donc le droit qu'à un seul Doliprane® de 1.000 mg en plus.
Dans près d'un tiers des cas (30%), le conseil du pharmacien s'est ainsi avéré "médiocre", avec une posologie variant de 3 à 4 grammes par jour. "Des posologies de 4 grammes par jour ne doivent être données que lorsqu'un médecin s'est prononcé pour les conseiller au malade", rappelle Daniel Bideau. Enfin, dans 46% des cas, le conseil donné a été jugé "bon", c'est-à-dire jusqu'à 3 grammes de paracétamol par jour.
Manque de lisibilité des prix
Autre enseignement de l'étude : si les prix sont affichés dans près de neuf pharmacies sur dix, 22% d'entre elles ont "des prix peu, voire pas du tout lisibles pour les médicaments sans ordonnances situés derrière le comptoir", déplore l'UFC-Que choisir. Par ailleurs, les clients sont très peu informés de la variation de prix entre officines. Or les disparités sont importantes : le prix moyen de l'Actifed® jour et nuit a été évalué à 5,71 euros mais, selon l'enquête, il peut aller de 2,99 euros à 9,10 euros…
Pour raviver la concurrence et faire diminuer les prix, l'association de consommateurs souhaite que les médicaments sans ordonnance puissent être vendus en parapharmacie et en grande surface, "mais à condition de garantir les mêmes garanties qu'en pharmacie", prévient Alain Bazot, président de UFC-Que choisir.
Pour cela, un pharmacien devra être présent sur le lieu de vente. Autre prérequis : la vente aurait lieu dans "un espace dédié aux produits de santé, séparé du point de vente, avec encaissement auprès du personnel de cet espace". "Il est indispensable que la vente soit effectuée sous la surveillance directe d'une pharmacien diplômé", renchérit Alain Bazot.
Interdire la publicité
L'association réclame également l'interdiction de la publicité sur les médicaments disponibles en automédication, ainsi que la promotion de la dénomination commune internationale (DCI). Cette appellation internationale donnée à chaque molécule augmente la transparence auprès grand public et permet d'éviter des interactions dangereuses entre différents produits. Dans le même esprit, un encadré sur les emballages pourrait porter sur les interactions à éviter et les principales contre-indications.
Une dépense de 2,24 milliards d'euros
Les Français ont dépensé 2,24 milliards d'euros en automédication en 2017, soit 14% de leurs dépenses directes de santé, a évalué le 21 mars 2018 l'association UFC-Que choisir. Sur ce montant, une part proche d'1,8 milliard d'euros correspond aux médicaments non remboursables, c'est-à-dire vendus à prix libres. "Ils représentent 80% des achats", précise l'association de consommateurs. Les prix des médicaments non remboursables ont augmenté de 29% entre 2006 et 2016, alors que l'inflation générale a grimpé de 12%.Par comparaison, les prix des médicaments remboursables ont diminué de 31% sur la même période. Remboursés lorsqu'ils sont prescrits par un médecin, ces médicaments sont "le plus souvent vendus au prix du plafond fixé par l'assurance maladie", rappelle l'UFC-Que choisir. En automédication, ils ne sont pas pris en charge, soit une dépense de 457 millions d'euros en 2017.
De son côté, l'Afipa, une association regroupant des laboratoires, note dans son baromètre 2017 que l'automédication représente 12,9% du marché pharmaceutique en France, loin des 51% en Grande-Bretagne, 41,9% en Allemagne, 39,6% en Belgique ou encore 38,2% aux Pays-Bas. L'Italie se situe à 11,7% et l'Espagne à seulement 8,4%.
© Agence fédérale d’information mutualiste (Afim)
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