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L'efficacité spectaculaire d'une thérapie génique contre la béta-thalassémie, grave maladie génétique

Une nouvelle méthode de thérapie génique a permis à des patients atteints d'une grave maladie rare, la béta-thalassémie, de se passer partiellement ou totalement des transfusions sanguines régulières auparavant nécessaires à leur survie. Ces premiers résultats concernant 22 patients d'une étude internationale on fait l'objet d'une publication mercredi 18 avril 2018 dans la prestigieuse revue New England Journal of Medicine. Ces travaux sont à attribuer à l'institut de recherche en génétique parisien Imagine et l'hôpital Necker (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), en collaboration avec une entreprise américaine de biotechnologies, bluebird bio.

La béta-thalassémie, une maladie génétique des globules rouges qui oblige à des transfusions régulières

La béta-thalassémie est l'une des maladies génétiques les plus fréquentes résultant d'un défaut dans le gène permettant la production de l'hémoglobine, la protéine transportant l'oxygène dans les globules rouges. Les thalassémies conférant une protection contre le parasite du paludisme, elles sont fréquentes dans les régions touchées par cette maladie infectieuse (Moyen-Orient, Asie, Afrique sub-saharienne, pourtour méditerranéen en Europe). Rares dans la forme grave de la pathologie, les malades sont au nombre d'environ 100.000 dans le monde et 350 en France, selon Orphanet. Les bêta-thalassémies sont en effet de sévérité variable selon si la mutation diminue ou annule complètement la production d'hémoglobine. "Dans la forme la plus grave, on est totalement anémié, et dépendant d'une transfusion sanguine mensuelle à vie", explique à l'AFP le Pr Philippe Leboulch, fondateur de bluebird. Ainsi, certaines formes légères n’entraînent aucun symptôme quand d’autres très sévères sont létales si elles ne sont pas soignées. Les seuls traitements sont aujourd'hui les allogreffes de moelle saine par un donneur compatible, mais la plupart des malades subissent des transfusions régulières, les obligeant à prendre des traitements chélateurs de fer pour lutter contre son accumulation, toxique pour l'organisme.

L'avènement de la thérapie génique s'est faite en 2010 sur un seul patient

C'est en 2010 que la chercheuse et professeure Marina Cavazzana, également à l'origine des travaux de 2018, publie le cas d'un patient béta-thalassémique sévère, qui, grâce à l'utilisation d'une thérapie génique, a depuis pu se passer de ses transfusions. La méthode est simple : on prélève d'abord les propres cellules souches de la moelle osseuse du patient, que l'on corrige en laboratoire grâce à ce qu'on appelle un "vecteur", et qui est en réalité un virus modifié pour qu'il insère non pas son ADN viral, mais un ADN choisi (ici les gènes nécessaires à la production d'hémoglobine fonctionnelle). Bien qu'il ne s'agisse pas de la technologie CRISPR dont on parle beaucoup ces dernières années, le principe de ce vecteur est le même. Le patient subit ensuite un traitement pour supprimer sa moelle osseuse malade, puis on lui réinjecte ses propres cellules modifiées par le vecteur. "On fait de l'addition de gène, pour remplacer celui qui fait défaut, grâce à une sorte de cheval de Troie qui va amener l'ADN thérapeutique", indique le Pr Leboulch. C'est pour tester l'efficacité et la tolérance d'un vecteur similaire, appelé LentiGlobin et produit par bluebird bio, que ces nouveaux travaux à plus grande échelle ont été réalisés en France et aux Etats-Unis sur 22 patients béta-thalassémiques.

3 ans après le traitement, 15 patients sur 22 n'ont plus besoin de transfusions

Pour le Pr Cavazzana, les résultats sont spectaculaires. Parmi ces patients, "aucun ne fait de complication. Il n'y a aucun effet secondaire". Ainsi, les 9 patients atteints de la forme la plus sévère de la maladie ont vu leurs besoins de transfusions se réduire de 73%, 3 d'entre eux n'en ayant carrément plus besoin du tout. Quant aux 13 autres patients, atteints de la forme la plus courante de la béta-thalassémie et de variations diverses, 12 d'entre eux n'avaient plus du tout besoin de transfusions après le traitement à la fin des 3 ans de suivi sur les 15 ans minimum prévus au total. "Ces résultats sont d'une grande importance", souligne la revue New England Journal of Medicinedans un éditorial. "Les résultats ici proviennent (…) sont incroyablement prometteurs", a déclaré sur Science Media Center le Pr Darren Griffin, professeur de génétique à l'Université du Kent en découvrant ces travaux, les qualifiant d'"avancée significative", en particulier pour la "qualité de vie des patients" qui se trouve grandement améliorée par l'interruption des transfusions sanguines.  Une patiente de 20 ans traitée à Paris, d'origine thaïlandaise, a d'ailleurs témoigné de sa "deuxième vie". "Le traitement était dur, en milieu stérile pendant deux mois. Je ne pouvais pas manger par la bouche. C'était très long de ne pas pouvoir sortir", a-t-elle raconté à l'AFP. "Mais maintenant tout est normal dans ma santé. Je mange de tout, je fais du sport, j'étudie. Enlever les transfusions de ma vie m'a beaucoup soulagée".

Avec AFP

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