Depuis sa prise de fonction voilà près d’un an, le président Emmanuel Macron a répété sa volonté de faire</a> de la prise en charge de l’autisme une priorité nationale. Après neuf mois de concertation, le gouvernement a dévoilé, vendredi 6 avril, les premiers contours du quatrième plan autisme, très attendu par les familles. Mais les responsables associatifs dénoncent, à l’unisson, « un plan sans moyens » qui provoque une « déception immense » et une « vraie colère ».
Le montant de l’enveloppe, d’abord, a plongé Christine Meignen, présidente de l’association Sésame autisme, dans un « désespoir profond ». Sur cinq ans, 344 millions d’euros seront alloués pour améliorer</a> la recherche, le dépistage et la prise en charge de l’autisme. « Ce n’est pas réaliste de croire</a> qu’avec si peu on va pouvoir</a> changer</a> la situation des centaines de milliers de familles en détresse », analyse la responsable associative.
Le quatrième plan est pourtant mieux doté que le précédent, qui, pour la période 2013-2017, débloquait 205 millions d’euros de fonds. Mais l’association Autisme France</a> rappelle qu’à titre</a> de comparaison, le plan Alzheimer avait été doté d’1,6 milliard d’euros pour la période 2008-2012.« Ce qu’on nous présente n’a ni la forme ni les moyens d’un grand plan de santé publique », juge Danièle Langloys, présidente de l’association.
« Arrêter d’empiler des plans qui ne font rien avancer</a> »
En janvier, la Cour des comptes avait pourtant publié un rapport accablant, estimant à 6,7 milliards d’euros le coût annuel de la gestion de l’autisme, pour un résultat peu efficace. « Il faut réaffecter efficacement cet argent public mal utilisé », résume Danièle Langloys, qui demande à ce que soit « reconnu la spécificité de l’autisme ».
La Cour des comptes jugeait d’ailleurs « assez décevant » le résultat des trois plans successifs lancés depuis 2005. « Il faut arrêter</a> d’empiler des plans qui ne font rien avancer concrètement », renchérit M’hammed Sajidi, le président de l’association Vaincre</a> l’autisme, qui rappelle que « seulement 50 % des objectifs du deuxième plan ont été réalisés, et moins de 50 % pour le troisième plan. » Son association avait d’ailleurs refusé de participer</a> aux concertations : « Ce sont des promesses dites et redites, il n’y a pas d’écoute des besoins concrets émis par les familles. »
Le diagnostic précoce, « un échec total »
Dans le détail, le quatrième plan autisme met l’accent, comme le plan précédent, sur le diagnostic précoce des enfants. « Nous allons généraliser</a> la formation</a> de tous les professionnels, pédiatres, médecins, pour avoir</a>, aux consultations prévues au neuvième mois ou au vingt-quatrième mois, le réflexe de vérifier</a> le minimum et d’alerter sur un trouble psycho</a>-autistique », a promis le chef de l’Etat.
Une volonté qui fait « doucement rire » Danièle Langloys, de Autisme France. « Sur le papier, c’est plein de bonnes intentions mais concrètement, sur le terrain, le diagnostic précoce est un échec total », rappelle-t-elle. Selon le rapport de la Cour des comptes, seuls 15 % des enfants bénéficient aujourd’hui du diagnostic et de l’intervention précoces.
« Il faut hausser</a> le ton, dire</a> que des choses ne vont pas et faire le ménage », souligne Danièle Langloys, déçue de voir</a> « le manque de courage politique</a> de ce nouveau gouvernement ». Elle appelle de ses vœux des « sanctions contre les professionnels qui ne respectent pas les recommandations ».
« Manque d’éléments concrets »
Certains éléments de la nouvelle stratégie nationale, déclinée en vingt mesures, vont pourtant « dans le bon sens », juge Christine Meignen. « C’est bien de parler</a> d’inclusion à l’école puisque ça fait trente ans qu’on le réclame », dit cette mère d’une enfant autiste. En 2014, le Conseil de l’Europe</a> avait enjoint la France de respecter</a> le droit des enfants et adolescents autistes à être</a> scolarisés dans des établissement ordinaires, alors que seulement 20 % des enfants autistes le sont actuellement.
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A ce sujet encore, tous les responsables associatifs déplorent un « manque d’éléments concrets pour obtenir</a> des résultats » et un discours qui « reste de l’ordre du symbolique ». Pas d’ouvertures de postes, pas de formations des acteurs de l’éducation nationale, pas de discussions</a> avec les collectivités... « On est dans un bricolage constant, avec des dispositifs de classes spécialisés qui constituent une fausse scolarisation », déplore M’hammed Sajidi, de l’association Vaincre l’autisme. « Jamais le droit de l’enfant n’est prioritaire », dit-il.
Pour les adultes, « c’est le néant »
Le quatrième plan autisme laisse en outre de côté plusieurs problématiques de taille pour les familles. Pour les adultes autistes, notamment, « c’est le néant », déplore Christine Meignen, qui appréhende déjà « ce qu’elle va pouvoir annoncer</a> aux familles ». Avec seulement quelques crédits</a> alloués pour des logements autonomes, « ça ne répond en rien à la crise d’accueil que l’on connait actuellement avec des listes d’attente interminables et des trentenaires maintenus dans des structures pour enfants faute de places ailleurs », dit Christine Meignen.
Les responsables associatifs saluent certes la volonté d’intensifier la recherche, alors que les scientifiques estiment connaître</a> environ 10 % des causes de l’autisme. Mais là encore, « les familles ne sont pas écoutées alors que ce sont elles qui expérimentent chaque jour », rappelle M’hammed Sajidi.
Preuve de cette méconnaissance, il n’y a aujourd’hui aucune étude épidémiologique qui permette de connaître le nombre de personnes souffrant de troubles autistiques en France. Si au niveau mondial, les études montrent un taux de prévalence</a> de l’autisme entre 1 et 1,5 % de la population</a>, en France, la seule étude existante a établi un taux de 0,36 %. « C’est comme le nuage de Tchernobyl, ça s’arrête aux frontières françaises », ironise Danièle Langloys.
« Depuis mon arrivée, j’ai accéléré le déploiement d’un système d’information commun, pour disposer</a> notamment d’un état des lieux</a> d’ici deux ans », a expliqué vendredi la secrétaire d’Etat aux personnes handicapées, Sophie Cluzel, dans un entretien au Monde. Elle a également annoncé le lancement d’un « appel d’offres pour constituer</a> une cohorte qui permettra de recueillir</a> des données épidémiologiques, le suivi, l’impact social</a> sur les familles ».
Des engagements auxquels Danièle Langloys « ne croit absolument pas », tant « rien n’est fait pour faire bouger</a> le monde</a> médical ». La déception des responsables associatifs est d’autant plus forte que le quatrième plan autisme avait fait l’objet d’un « matraquage de communication », selon Christine Meignen. Pour elle, « le gouvernement nous a mené en bateau, la montagne accouche d’une souris ».
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