
- Le cancer du col de l’utérus touche 3.000 femmes chaque année et provoque la mort de 1.100 patientes.
- Alors que l’OMS assure que ce cancer peut être éradiqué grâce à la prévention, la France a choisi de passer par un dépistage organisé en 2019.
- Mais pour un collectif, la Haute Autorité de Santé se trompe en s’appuyant sur un dépistage avec des frottis tous les trois ans au lieu de privilégier le test HPV, plus fiable et privilégié de nombreux pays européens.
Un rendez-vous manqué aux conséquences dramatiques. Pour le collectif HPV maintenant, qui a alerté les médias ce jeudi matin, les autorités de santé n’ont pas choisi la bonne méthode pour améliorer le dépistage du cancer du col de l’utérus. Ce cancer, évitable et dû à une infection sexuellement transmissible, le papillomavirus (HPV), touche environ 3.000 patientes et provoque le décès de 1.100 d’entre elles chaque année… Pourquoi cette prise de position ?
Un dépistage organisé basé sur le frottis
Une campagne de dépistage organisé vient pourtant d’être lancée depuis le début de l’année. Concrètement, les patientes entre 25 et 65 ans n’ayant pas réalisé de frottis depuis trois ans reçoivent un courrier les encourageant à se rendre chez un médecin généraliste, un gynécologue ou une sage-femme pour effectuer cet examen, totalement remboursé et sans avance sur simple présentation de la lettre. « A peine 60 % des femmes suivent le dépistage de façon spontanée, avec beaucoup de trous dans la raquette, car certaines femmes ne font jamais de frottis, d’autres trop souvent », analyse Richard Fabre, biologiste et porte-parole du Collectif HPV maintenant.
Pour ce collectif, ce dépistage organisé, certes nécessaire, risque d’être peu efficace. En effet, le test HPV, testé depuis une dizaine d’années, est plus sensible que le frottis. Il permettrait donc d’éviter de passer à côté de lésions précancéreuses pour des milliers de femmes. « Entre 25 et 30 % des femmes qui développent ce type de cancer ont réalisé un dépistage par frottis au rythme recommandé », souligne Joseph Monsonego, gynécologue et membre du collectif. Autre avantage : en cas de test HPV négatif, les femmes pourraient passer d’un frottis tous les trois ans à un test HPV tous les cinq ans. « Comment peut-on démarrer une campagne de dépistage organisé avec un test que tout le monde est en train d’abandonner ? », se lamente pour sa part Geneviève Ferret, biologiste et membre fondatrice du collectif.
Il s’agit d’une question de timing. La Haute Autorité de Santé doit rendre en juillet prochain, selon nos informations, de nouvelles recommandations concernant ce test HPV. Et ce six mois après le début de cette campagne de dépistage organisé, qui se base sur des recommandations qui datent de 2010. Une époque à laquelle on connaissait bien moins ce test moléculaire, depuis adopté par nombre de nos voisins européens.
« Chronique d’un scandale annoncé »
La France semble en effet un peu seule dans ce choix d’un dépistage qui privilégie le frottis. Ou plus précisément qui s’appuie sur le frottis en prévention primaire et propose le test HPV quand les images semblent problématiques. L’Italie, la Belgique, l’Angleterre, la Suède, les Pays-Bas, la Turquie ont fait le choix inverse en préférant le test HPV en première intention et le frottis en complément. « Le test HPV est fiable à 99 % quand le frottis ne l’est qu’à 70 % », synthétise le gynécologue Joseph Monsonego.
Et ces médecins de s’appuyer sur l’exemple irlandais pour souligner l’urgence de repenser notre dépistage de ce cancer féminin. En mai 2018, Vicky Phelan, habitant dans l’ouest de l’Irlande, avait attaqué le laboratoire qui avait analysé ses examens. Car en 2011, son frottis, revenu négatif, aurait en réalité dû l’alerter sur la présence de lésions précancéreuses. Et elle n’est pas seule dans ce cas : au moins 221 femmes n’ont pas été dépistées à cause de faux négatifs. Un drame suivi d’un procès et d’une indemnisation des victimes à hauteur de 500 millions d’euros qui a encouragé les autorités sanitaires à changer de stratégie : depuis cette année, c’est désormais le test HPV qui est proposé en premier lieu. « En France, c’est la chronique d’un scandale annoncé par ce qu’il s’est passé ailleurs », avance Richard Fabre.
Le désarroi de certains médecins
Les soignants qui ont monté ce collectif soulignent le décalage entre les recommandations venues d’en haut et des praticiens qui, sur le terrain, se sentent démunis et tiraillés. « Aujourd’hui, on recommande aux Françaises un test que je ne conseillerai ni à ma femme, ni à mes filles », déplore Richard Fabre, biologiste. « Je reçois des femmes jeunes, en bonne santé apparente et je sais qu’un certain nombre d’entre elles, malgré des frottis qui reviennent négatifs, sont déjà touchées par des lésions précancéreuses et je ne peux rien faire, se désole Geneviève Daviaud, gynécologue et membre fondateur du collectif. En tant que médecin, on a une obligation déontologique d’offrir aux patientes les meilleurs moyens pour les maintenir en bonne santé. Or aujourd’hui, nous sommes face à un dilemme quotidien. Cela fait dix ans qu’on attend que la Haute Autorité de Santé (HAS) prenne la décision de modifier ce dépistage. »
Une colère partagée, au vu d’un rapport du Collège des gynécologues (CNGOF) qui pointe : « Il est clair qu’il faut non seulement organiser le dépistage mais changer de technique, car il n’est plus tolérable d’utiliser une méthode donnant autant de faux négatifs. Le test HPV est le candidat actuellement le mieux placé pour prétendre à la succession de la cytologie. » Mais à la HAS, on se défend de tout « retard ». Car si dans un avis de 2017, l’autorité sanitaire recommandait de vacciner et d’améliorer le dépistage, elle n’a été saisie qu’en 2018 sur la question précise du test HPV.
Un test pas remboursé
Selon un membre du collectif, même si le test HPV était adopté par les recommandations de la HAS, les patientes n’en bénéficieraient pas avant 2023. En attendant, les patientes peuvent demander à réaliser ce test HPV (27 €), mais il n’est pas remboursé… Mais un des avantages considérables du test HPV est que l’on peut réaliser un auto prélèvement, chez soi. Un argument de taille pour celles qui sont très peu suivies, qui vivent dans des déserts médicaux ou qui, après une mauvaise expérience, évitent les cabinets de gynéco.
Jeudi, le mari d’une patiente décédée en août 2016 d’un cancer du col de l’utérus a achevé son témoignage en larmes, en exhortant toutes les femmes à réclamer à leur gynécologue ce test HPV. Problème, il n’est pas forcément bien connu et maîtrisé par tous les gynécologues et laboratoires d’analyses. « Pourquoi ça traîne autant quand il s’agit de la santé des femmes ? » conclut Geneviève Daviaud.
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