C'est une conséquence du confinement à laquelle on ne s'attendait pas. Notre mode de vie bouleversé par la pandémie aurait eu des effets sur les naissances. Deux études, irlandaise et danoise, notent en tout cas une réduction significative des accouchements prématurés durant cette période.
L'étude irlandaise se base sur les données de la maternité de l'hôpital de Limerick, la seule pour une population de 473 000 habitants dans l'ouest de l'île. Les chercheurs ont noté que la proportion de nouveau-nés faisant moins de 1,5 kg a diminué. Même si la caractéristique première d'une naissance prématurée est le nombre de semaines passées dans le ventre, le poids du nourrisson reste un indicateur pour les scientifiques.
Une chute de 90 % au Danemark
Dans l'hôpital irlandais, entre janvier et avril 2020, 2 accouchements sur 1000 étaient prématurés. Alors qu'entre janvier 2001 et avril 2019, ce chiffre était de 8 naissances sur 1000 en moyenne. Soit une baisse de 73 %. Et les chiffres du Danemark corroborent les statistiques irlandaises, à l'échelle nationale cette fois-ci. Une chute de 90 % des naissances prématurées pendant le confinement a été mesurée dans le royaume.
Mais à quoi est dû ce phénomène? Plusieurs facteurs peuvent avoir un impact : « Il y a l'âge de la femme, les grossesses multiples qui accentuent les risques et les conditions socio-économiques qui influent sur la maternité », rappelle Jean-Christophe Rozé, pédiatre au CHU de Nantes et président de la société française de néonatalogie.
Ne pas tirer de conclusions hâtives
Mais le manque de sommeil, la pollution ou encore la diminution des risques d'infections par d'autres maladies peuvent également avoir une influence. « Pendant le confinement, on a vécu dans un cocon et on se lavait les mains 25 fois par jour, cela réduit les risques d'attraper une infection », résume le professeur Laurent Salomon, gynécologue obstétricien à la maternité de l'hôpital Necker, à Paris.
Ce dernier appelle néanmoins à prendre ces études avec des pincettes car elles ne sont qu'« observationnelles » : « Ce sont des hypothèses de travail intéressantes pour des recherches futures, mais pas des conclusions. » De plus, les études ne prennent pas en compte la prématurité « induite », selon le médecin. « Beaucoup de cas d'accouchements avant terme sont provoqués par les médecins pour réduire les complications de santé des nourrissons, voire les décès », explique le professeur Salomon.
La France à la traîne
« Pendant le confinement, il y a eu moins de consultations qui auraient pu donner lieu à des naissances provoquées. Peut-être qu'il y a eu des décès in utero ou à la naissance qui auraient pu être évités, mais nous ne le savons pas », détaille le médecin. Et de conclure : « C'est comme dire que parce qu'il y a eu moins de consultations en cancérologie, il y a moins de cancers. Cela n'a pas de sens, alors il faut attendre d'en savoir plus. »
« Il faudrait des chiffres à l'échelle nationale », insiste le pédiatre Jean-Christophe Rozé qui n'a pas remarqué un tel phénomène au CHU de Nantes (Loire-Atlantique). Mais aucune donnée n'est disponible. « Nous n'avons pas encore de chiffres en France parce que nous ne sommes pas équipés pour. Le système français n'est pas assez fort à l'heure actuelle pour analyser des données en temps réel », explique-t-il.
Des pistes pour demain
« On aura les résultats dans trois ans à ce rythme », ironise Laurence Girard, présidente du comité scientifique de l'association SOS Préma qui accompagne les parents de prématurés. L'infirmière se veut néanmoins optimiste, car si les chiffres venaient corroborer les études déjà publiées, cela pourrait « donner des arguments sérieux pour de nouvelles politiques publiques ». Comme « le fait de mieux protéger les futures mamans du stress ou de la pollution en favorisant le télétravail ».
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