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Obésité : « Faut arrêter les Kinder »… La grossophobie médicale, ou quand la violence remplace la bienveillance - 20 Minutes

«Les remarques, on les subit un peu partout. Mais je crois que c’est dans le milieu médical où c’est le pire. » Depuis qu’elle est en surpoids, Elisabeth ne compte plus le nombre de propos vexants ou situations humiliantes qu’elle a vécus dans un cabinet médical. « En fait, on vous fait systématiquement des réflexions sur votre poids, explique la présidente de l’association "Poids, formes, bien-être", à Tours. J’ai déjà perdu 20 kg, et ce n’est toujours pas assez ! Si j’ai du mal à monter sur la table d’examen, c’est toujours de ma faute… Le problème, c’est que l’obésité n’est pas considérée comme une maladie, mais comme un défaut. Quand on va chez le médecin, on s’attend à de la bienveillance, pas à une telle violence. »

Alors que ce lundi 4 mars a lieu la Journée mondiale de l’obésité, de nombreux patients comme Elisabeth dénoncent la grossophobie dont ils sont – et c’est un paradoxe – victimes dans le milieu médical. Un phénomène que certains professionnels de santé ont identifié et tentent de combattre. « Il y a d’abord la stigmatisation systémique, comme le matériel inadapté, par exemple les brassards pour prendre la tension qui sont trop petits, exposait le mois dernier Rudy Caillet, médecin nutritionniste aux hôpitaux civils de Colmar, lors des journées scientifiques de l’Association française d’étude et de recherche sur l’obésité (Afero). Mais le monde de la santé n’échappe pas non plus à la stigmatisation explicite, ou inconsciente, en raison d’une vision trop simpliste du lien entre alimentation et corpulence. »

Dévalorisation, culpabilisation…

Ces dernières années, plusieurs études se sont intéressées à cette discrimination. Comme une thèse en médecine générale soutenue en 2022 par Aurore Le Merle et Raphaël Payeur qui indiquait que 87 % des répondants avaient déjà vécu une situation de grossophobie lors de consultations médicales ou paramédicales. Il s’agit principalement « de comportements de type paternalisme avec une attitude moralisatrice, mais également de la dévalorisation associée à une culpabilisation », note l’étude, qui rapporte certains propos : « Lors d’une IRM, le manipulateur radio a ri en disant "il va pas rentrer ou alors il va rester coincé" » ; « Il faudrait arrêter de manger des Kinder et se remettre à faire une activité physique, ma petite dame ».

Parfois, les remarques dépassent l’entendement. Aux journées scientifiques de l’Afero, on rapporte qu’une radiologue aurait par exemple conseillé à une femme d’aller à l’école vétérinaire pour passer son examen. Une autre patiente, souffrant d’arthrose, se serait entendue dire que « les prothèses pour mammouth n’existent pas ». « Un gynécologue a dit à l’une de nos adhérentes qu’à Auschwitz, il n’y avait pas ce genre de problème de poids, témoigne Elisabeth, qui a mené avec son association une étude sur la grossophobie médicale. Résultat, cela fait plus de vingt ans que cette femme n’est pas allée consulter. »

Eviter le corps médical

Si certains médecins imaginent que cela va produire un électrochoc chez leurs patients, c’est raté. « Il faut éviter les paroles du type "motivez-vous", "je vous ai déjà dit ce qu’il faut faire", conseille Vanessa Folope, endocrinologue et nutritionniste au CHU de Rouen. Car cela renvoie les patients à leurs peurs, à la croyance que leur valeur dépend de leur corpulence, et ils finiront par s’isoler, par éviter le corps médical. C’est un cercle vicieux. » Pour ce médecin, il faut surtout sensibiliser le personnel à la prise en charge de ces patients, notamment ceux qui sont en situation d’obésité dite massive.

« J’ai fait acquérir des combinaisons de 200 kg pour que les soignants puissent déjà ressentir les difficultés physiques mais aussi psychologiques, et j’ai animé des formations, illustre Vanessa Folope. Lors de l’évaluation, 87 % des répondants ont indiqué avoir changé une pratique professionnelle. » Des ateliers sont également organisés pour faire évoluer les mentalités des étudiants en médecine, notamment à Toulouse. « Il faut que ce paradigme ancien qui dit que "je mange moins, je bouge plus, et tout va mieux" évolue, espère Rudy Caillet. Et se demander si la stigmatisation n’est pas la première complication de l’obésité ».

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