La coqueluche fait un retour en force depuis quelques mois, et deux nourrissons de moins de trois mois sont décédés d’une forme maligne. Le Pr Eric Jeziorski, chef du service urgences post-urgences pédiatriques au CHU de Montpellier, rappelle l’importance du vaccin pendant la grossesse
Le Pr Eric Jeziorski est chef du service urgences post-urgences pédiatriques au CHU de Montpellier.
Qu’observez-vous depuis quelques mois ?
Depuis fin 2023, nous sommes confrontés à de nombreux cas de coqueluche, environ dix fois plus que d’habitude. Il faut remonter aux années 90 pour voir autant de cas ! Cette pathologie est habituellement peu fréquente, mais il y a des cycles.
À quoi est due cette augmentation des cas ?
Pendant la crise du Covid, les confinements ont entraîné une baisse de l’immunité globale. Il y a ce qu’on appelle une "dette immunitaire" dans la population. En 2022, une épidémie très forte nous avait déjà surpris par son ampleur. La coqueluche est une des maladies les plus transmissibles, encore plus que la rougeole par exemple. Et comme c’était sa première circulation depuis le Covid…
Comment se manifeste la maladie ?
Par des toux quinteuses très irritantes, qui durent plusieurs jours et doivent être diagnostiquées. S’il y a difficulté à respirer ou malaise, une hospitalisation de quelques jours peut s’avérer nécessaire, avec respiration sous oxygène si besoin. Les urgences pédiatriques du CHU sont les seules à prendre en charge des patients souffrant de formes sévères de la maladie.
Comment expliquer le décès de deux bébés à Montpellier ?
Ces nourrissons de moins de trois mois ont été victimes d’une forme maligne de la coqueluche. Ce sont des formes sévères de la maladie qui peuvent affecter le très jeune enfant. Ils sont souvent peu protégés, car le premier vaccin est à l’âge de deux mois, et le rappel à quatre mois. Et comme il faut compter un mois après le vaccin pour qu’il soit efficace…
Quelle est la solution pour atténuer les effets de la maladie ?
Les femmes enceintes doivent se faire vacciner pendant leur grossesse pour protéger leur bébé. C’est le meilleur moyen de prévention contre la coqueluche. Malheureusement, seules 10 à 30 % d’entre elles le sont en France. Il y a encore quinze ans, il y avait de nombreuses contre-indications pendant la grossesse. Mais des études ont montré qu’il n’y avait aucune incidence sur la grossesse. Il faut changer de paradigme. En Angleterre, 90 % des femmes enceintes sont vaccinées, ce qui entraîne une très forte réduction des formes graves de la maladie.
"Plusieurs cas de coqueluche cette année"
La forme maligne de la coqueluche est-elle fréquente ?
Non, habituellement, nous n’avons qu’un cas tous les deux à cinq ans au CHU. Là, nous en avons déjà eu plusieurs cette année.
Comment peut-on empêcher la contamination ?
Beaucoup de personnes qui sont infectées ignorent qu’elles le sont. Or, un malade peut contaminer tout son entourage. D’où l’importance de se faire vacciner, surtout s’il y a un nourrisson autour de soi. L’immunité, c’est cinq ans à la suite d’un vaccin et dix ans pour quelqu’un qui a été malade.
La coqueluche est-elle comparable à la bronchiolite, qui touche aussi les voies respiratoires ?
Non, la coqueluche ne va pas connaître un pic d’apparition soudain et encombrer nos services, comme la bronchiolite. Cette maladie est certes très contagieuse et touche aussi les enfants, mais elle est souvent bénigne.
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