
MODERNISATION - Médecin-urgentiste et chroniqueur santé pour LCI, Gérald Kierzek a co-présidé une mission sur l'information des patients dans le sillage de l'affaire du levothyrox. Avant de remettre son rapport à la ministre de la Santé, lundi, il explique ses propositions.
- Matthieu Jublin
L'affaire du Levothyrox va-t-elle faire bouger les autorités sanitaires ? Ce lundi, Magali Leo, de l'association de patients Renaloo, et Gérald Kierzek, médecin-urgentiste et chroniqueur santé pour LCI, remettent à la ministre de la Santé Agnès Buzyn leurs propositions pour améliorer l'information sur le médicament.
La ministre leur avait commandé un rapport après la crise causé par le Levothyrox, un médicament pour les malades de la thyroïde, dont la nouvelle formule a fait subir à certains patients d'importants effets secondaires. Tardant à réagir ou mettant en doute la parole des patients, les autorités sanitaires avaient été très critiquées. Avant de remettre son rapport, Gérald Kierzek a expliqué à LCI ses propositions pour faciliter la communication entre les patients et les autorités sanitaires.
LCI : Quels sont les dysfonctionnements des autorités sanitaires que vous pointez dans votre rapport ?
Gérald Kierzek : Ce rapport commandé par Agnès Buzyn fait suite à l'affaire du Levothyrox, qui est une affaire parmi d'autres. Il y a aussi eu le Distilbène il y a plusieurs décennies, ou encore le Mediator. L'idée est donc de faire un diagnostic et de proposer un traitement. Ce rapport, qui n'est pas accablant, fait juste le diagnostic d'un manque de réactivité des autorités sanitaires, qui savent très bien contrôler la sécurité d'un produit ou le retirer quand il y a une dangerosité. Mais dans les situations intermédiaires, quand il faut anticiper ou détecter des pétitions sur les réseaux sociaux qui parlent d'effets secondaires pas prévus en amont, c'est difficile pour ces autorités. L'objectif est de moderniser ce dispositif : en termes de sécurité sanitaire, on ne peut pas faire sans Facebook, sans Twitter, sans les associations de patients, mais aussi sans les médecins. C'est étonnant qu'on ne puisse pas aujourd'hui contacter les médecins par SMS ou par mail.
Les patients ont besoin de savoir si ce qu'on leur dit à la télévision est vrai ou non, s'il faut écouter leur docteur ou la pétition sur internet, ou le communiqué du ministère
C'est donc essentiellement un problème de communication ?
Le rapport était centré sur l'information et la communication. Ce n'était pas un rapport sur la sécurité sanitaire, même si celle-ci fonctionne dans des délais rapides. Là où c'est plus compliqué, c'est au niveau des remontées du terrain, par les médecins ou les patients, ou la détection de signaux faibles sur Twitter. Ça, c'est de l'information ascendante. Mais l'information descendante est aussi à améliorer : où trouver une information fiable ? Les patients ont besoin de savoir si ce qu'on leur dit à la télévision est vrai ou non, s'il faut écouter leur docteur ou la pétition sur internet, ou le communiqué du ministère. Avec Magali Leo, nous avons constaté que les autorités sanitaires ont du mal avec les médias modernes et les réseaux sociaux. Il n'y a pas aujourd'hui de site internet qui compile les informations avec un langage accessible pour jouer ce rôle de source fiable, transparente et indépendante.
La commande d'Agnès Buzyn était claire : pas d'usine à gaz
Vous plaidez aussi pour la nomination d'un "Monsieur ou Madame Médicament" pour échanger avec les patients. Quelles sont les autres mesures que vous allez défendre ?
Ce "Monsieur ou Madame Médicament" est très important comme interlocuteur en amont. Ce serait une sorte de cellule qui est disponible en permanence et permettrait d'éviter des affaires comme celle du Levothyrox. On aurait pu anticiper cette affaire, quand on sait que 3 millions de personnes sont concernées. Il s'agit aussi d'avoir un interlocuteur pour la presse. Quand un journaliste veut des informations parce qu'il a vu une pétition ou une association de patients, c'est compliqué d'avoir une réaction des autorités sanitaires. Celles-ci ont un prisme médico-légal et se disent 'attention à ce que je vais dire', sauf qu'on est dans une société qui va très vite et il faut à tout prix adapter la rapidité. Mais c'est aussi une culture du médicament à développer à plus long terme. Un exemple simple : mettre au programme scolaire l'enseignement sur le médicament, pour dire qu'il y a des bénéfices, mais aussi des risques. Autre mesure concrète et symbolique : pourquoi ne pas diffuser sur les écrans des pharmacies des messages sanitaires en cas d'alerte ?
Pensez-vous que ces propositions seront bien accueillies ?
Nous faisons des propositions, mais c'est à la ministre de les mettre en oeuvre ou non. Sa commande était claire : pas d'usine à gaz. Nous avons respecté cette consigne, en proposant des mesures opérationnelles à prendre tout de suite, d'autres demain et d'autres après-demain. Agnès Buzyn a déjà fait quelques annonces, comme le fait que l'Agence de sécurité du médicament (ANSM) doit conserver un rôle central et qu'il n'est pas question d'en créer une autre. Il faut moderniser ce qui existe.
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